Mandy
de Panos Cosmatos
Quinzaine des Réalisateurs






Les feux de l’amour

1983, une région déserte et sauvage. Red Miller est tombé profondément amoureux de l’attrayante Mandy Bloom. La vie qu’il s’est construite s’écroule soudainement lorsqu’une bande de créatures surnaturelles abjectes et dévastatrices fait irruption avec furie dans son paradis idyllique. Brisé, Red ne vit plus que pour une seule chose : les traquer et se venger… Panos Cosmatos est le fils de George P. Comastos (1941-2005), tâcheron notable auquel on ne doit que du lourd, du Pont de Cassandra à Rambo II en passant par Bons baisers d’Athènes, l’un des pires James Bond. Tel père, tel fils ?  Nous ne tomberons pas dans ce préjugé. Et après tout, les enfants de la balle ont fait légion au cinéma, de Jacques Tourneur reprenant le flambeau de Maurice à Brandon Cronenberg s’aventurant dans les ténèbres de papa avec Antiviral. Toujours est-il que Mandy déçoit, car on pouvait espérer au vu de son scénario une perle horrifique de la trempe de Massacre à la tronçonneuse, que la Quinzaine avait révélé en 1975. Il n’en est rien. Reprenant les codes du revenge movie, le cinéaste n’innove guère, hésitant entre la pose auteuriste du David Cameron Mitchell de It Follows et le ton assumé de série B déployé dans Ghostland de Pascal Laugier. Non seulement Panos Cosmatos échoue sur les deux tendances mais il ne parvient même pas à rendre efficace un produit qu’aucun distributeur n’a acheté, le film étant uniquement exploité en VOD. Il y avait pourtant de quoi créer un climat oppressant avec le récit de ce paisible bûcheron dont l’existence tourne au cauchemar après l’irruption dans sa maison d’une bande d’abrutis sanguinaires et sectaires qui semble inspirés de Charles Manson et son clan.

Mais la narration suit une piste trop convenue, les effets gore n’impressionnent guère, et jamais le film ne s’écarte du cahier des charges que le réalisateur s’était forcé de suivre. On sauvera toutefois quelques passages inspirés ou dénotant un effort stylistique : l’usage d’éclairage bleus et rouges qui mettent en valeur les effusions de sang, l’incrustation de séquences animées apportant une touche d’onirisme, la musique inspirée du regretté Jóhann Jóhannsson, collaborateur habituel de Denis Villeneuve, et quelques pointes d’humour et d’autodérision qui permettent à la seconde partie d’échapper au ridicule. Nicolas Cage dont la filmographie est de plus en plus désolante n’arrange rien, tant son jeu outrancier oscille entre les vociférations et les roulements d’yeux mécaniques. On sera plus indulgent avec ses partenaires : la diaphane Andrea Riseborough, aux faux airs de Shelley Duvall, est une belle idée de casting, et les acteurs incarnant les very bad boys se meuvent avec conviction dans le dispositif : Linus Roache en gourou aux cruelles intentions, mais aussi Ned Dennehy et Richard Brake dont les trognes de second couteau mériteraient d’être réutilisées dans des productions plus ambitieuses. Au final, Mandy n’apporte aucun sang neuf. S’il est certes excessif de parler de nanar de série Z, force est de reconnaître que c’est une série B ratée dont on doute qu’elle sera réévaluée un jour.

Gérard Crespo



 

 


2h01 - États-Unis, Belgique - Scénario : Aaron STEWART-AHN, Panos COSMATOS - Interprétation : Nicolas CAGE, Andrea RISEBOROUGH, Ned DENNEHY, Olwen FOUÉRÉ, Richard BRAKE, Clément BARONNET, Linus ROACHE.

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