Le Grand Bal
de Laetitia Carton
Sélection officielle
Cannes Classics
Cinéma de la Plage






« Une mazurka vaut toutes les larmes du Grand Bal. »

Troisième long métrage documentaire de Laetitia Carton, Le Grand Bal est né de la volonté de filmer un événement auquel la jeune femme participe régulièrement. Depuis que sa grand-mère lui avait conté la ferveur des nuits populaires du bal, la réalisatrice a découvert la passion pour cette activité et a voulu installer sa caméra au Festival Les Grands Bals de l'Europe, à Gennetines, durant l'été 2016. Dans cette petite commune de l'Allier, deux mille personnes se réunissent tous les ans pour danser pendant une semaine : la scottish, la mazurka, le cercle circassien, ou le congo des Landes, sans oublier le tango ou la danse orientale. Seuls ou avec des partenaires, les participants âgés de 7 à 77 ans (mais surtout de 30 à 60) s'adonnent au vertige de la beauté musicale, de l'expression et de la promiscuité des corps, de la communion et de la convivialité. Des cours de danse l'après-midi au « bœuf » du petit matin (une sorte d'after pour les plus courageux et jeunes), des musiciens et des danseurs s'activent sur une dizaine de parquets sous chapiteau, arrivant à trouver quelques heures de sommeil sous une tente en pleine nature... A mi-chemin de la désuétude des bals de quartier et des transes de rave-parties, la manifestation, bon enfant, est encadrée par des professionnels compétents qui perpétuent des traditions sans les maintenir figées, optant pour l'ouverture d'esprit. « L’équipe a vécu avec les danseurs et les musiciens, la même expérience. Les mêmes sensations : tourner, tenir, manger, danser, danser, danser, dormir, tourner, danser, boire, tourner, danser, se rencontrer…

Et filmer les regards, les échanges, la communauté, la somme de ses singularités, le mouvement balbutiant, naissant, l'agilité, la simplicité des expérimentés, les lâcher-prises, les libertés que l'on prend, la folie douce, la grande humanité qui défile, la joie qui illumine les visages, les attentes sur les chaises, l’amour qui naît, la fatigue qui tombe, les liens qui resserrent et font tenir debout », a déclaré la cinéaste. A mille lieues de la superficialité des discothèques ou de la ringardise de certaines festivités locales, le rituel traité dans Le Grand bal valorise un certain art de vivre que la cinéaste capte avec brio. Loin de donner dans le reportage télévisé, Laetitia Carton soigne la qualité visuelle du métrage, maîtrisant la profondeur du champ, accompagnée d'un long travail d'étalonnage, pour une immersion crédible du spectateur avec les participants. Quelque part entre l'amour de l'authenticité du terroir filmé par Agnès Varda dans Visages, villages et le document ethnologique dans la lignée du Jean Eustache de La Rosière du Pessac, ce documentaire s'avère donc très agréable, même si l'on peut regretter les lieux communs et la platitude des propos de certains témoignages. Et dans une collection de films sur le thème du bal et de ses émois, l'œuvre aurait certes sa place, entre Le Bal d'Ettore Scola et Carnet de bal de Julien Duvivier, mais ne saurait rivaliser avec les sulfureux Carrie au bal du Diable de Brian De Palma ou Le Bal des vampires de Roman Polanski... Cette réserve étant précisée, ce très joli film consensuel reste évidement recommandable.

Gérard Crespo



 

 


1h39 - France - Documentaire - Distributeur : PYRAMIDE DISTRIBUTION.

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