Vers la lumière
Hikari
de Naomi Kawase
Sélection officielle
En compétition

Prix œcuménique







« On pourrait dire que le cinéma est lumière »

Misako passe son temps à décrire les objets, les sentiments et le monde qui l’entoure. Son métier d’audiodescriptrice de films est toute sa vie. Lors d’une projection, elle rencontre Masaya Nakamori, un photographe au caractère affirmé dont la vue se détériore irrémédiablement. Naissent alors des sentiments forts entre un homme qui perd la lumière et une femme qui la poursuit… De Suzaku (Caméra d’or en 1997) à Hanezu, l’esprit des montagnes, Naomi Kawase a déployé un cinéma sensoriel et ésotérique, scrutant les interactions entre la nature et l’âme humaine, dans une série de films intimistes dont le dernier joyau fut le très beau Still the Water. Les Délices de Tokyo avait marqué un tournant dans son œuvre, par le recours assumé à l’émotion et une volonté d’élargir son public. Vers la lumière se situe dans une ligne médiane. Davantage explicatif et moins symbolique, tout en ménageant des zones d’ombre, le film joue la carte du sentimentalisme mais préserve une certaine ascèse, proposant une réflexion intéressante sur le processus créatif. « Contrairement aux personnes qui naissent aveugles, le fait de perdre progressivement la vue comme Nakamori constitue un trauma psychologique fort. Il se sent désarmé face à son nouveau rapport au monde et aux autres. Il doit apprivoiser ses autres sens qui se développent pour compenser sa vue qui disparaît », a déclaré la réalisatrice dans le dossier de presse.

Naomi Kawase déploie beaucoup de sensibilité dans la description des rapports entre Masaya et Misako. Si le photographe cherche à préserver un sens à sa vie, pourra-t-il être aidé par une jeune femme passionnée par son métier mais dont la motivation s’est construite sur un désir d’échappatoire au réel ? Sans doute y-a-t-il une part d’autobiographie et d’introspection dans cette œuvre toute en nuances, le personnage Misako incarnant le double de la cinéaste, de par sa fascination pour les lumières et la transmission des émotions visuelles et sonores, mais aussi ses doutes sur sa capacité à faire partager une démarche et sa vision du monde. Dans le rôle de Masaya, on remarquera la justesse de jeu de Masatoshi Nagase, acteur principal des Délices de Tokyo, et que l’on a aussi croisé dans des films de Jim Jarmusch (Mystery Train, Paterson). Mais contrairement à Michèle Morgan dans La Symphonie pastorale ou Björk dans Dancer in the Dark, il n’a pas attiré l’attention du jury cannois pour sa composition de non-voyant…

Gérard Crespo


1h41 - Japon - Scénario : Naomi KAWASE - Interprétation : Masatoshi NAGASE, Ayame MISAKI, Tatsua FUJI, Mantarô KOICHI.

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