Djam
de Tony Gatlif
Sélection officielle
Hors compétition

Événement ciné-concert









De la musique avant toute chose

Djam, une jeune femme grecque, est envoyée à Istanbul par son oncle Kakourgos, un ancien marin passionné de rebétiko, pour trouver la pièce rare qui réparera leur bateau. Elle y rencontre Avril, une Française de dix-neuf ans, seule et sans argent, venue en Turquie pour être bénévole auprès des réfugiés. Djam, généreuse, insolente, imprévisible et libre, la prend alors sous son aile sur le chemin vers Mytilène. Un voyage fait de rencontres, de musique, de partage et d’espoir…  Tony Gatlif avait déjà eu les honneurs de la sélection officielle avec Exils, Transylvania et Geronimo. Djam est fidèle à son univers : personnages en quête de leurs racines, errance géographique, force de la musique qui adoucit les mœurs et permet une véritable catharsis des protagonistes. L’originalité du présent opus tient à son cadre spatial : de l’Île de Lesbos à Istanbul en passant par des petits villages grecs, Tony Gatlif élargit son champ de décor, la France étant évoquée de par le souvenir de Djam, Kabourgos et Avril : la mère de Djam, prédisposée pour le chant, avait trouvé l’âme sœur dans le restaurant de cuisine grecque que tenait Kabourgos à Paris ; Avril quant à elle est une enfant de banlieue, venue en Turquie en voulant suivre son petit ami. Il y a de faux airs de Thelma et Louise dans les déambulations ce ces deux jeunes filles, errant sur les routes et rencontrant sur leur passage une série de figures excentriques et déjantées, avec un goût du risque et de la provocation qui sont prétexte à des saynètes pittoresques.


Si le cinéaste en profite pour évoquer furtivement des sujets graves, comme le sort réservé aux réfugiés ou le surendettement des ménages victimes de la crise grecque, il évite pour autant le sermon et le ton larmoyant, les scènes de comédie et une légèreté ambiante prenant vite le dessus sur les situations tragiques. Le film vaut par son message humaniste et optimiste ainsi que, bien sûr, sa bande sonore, valorisant la musique rebétiko. « C’est une musique qui s’est développée dans les bas-fonds d’Athènes et de Thessalonique, puis dans les îles, lorsque les Grecs ont été chassés de la Turquie par Atatürk. Il n’y a jamais de colère dans cette musique, plutôt de la révolte et de la mélancolie comme dans toutes les musiques que j’aime. C’est une musique de mal-aimés, mais de gens fiers d’être ce qu’ils sont », a déclaré Tony Gatlif dans le dossier de presse. Le fait que ce genre musical emprunte à la fois des sonorités occidentales et orientales n’est pas un hasard, et traduit l’ouverture d’esprit d’un artiste défenseur du multiculturalisme. Le film doit enfin beaucoup au talent de Daphne Patakia qui crève littéralement l’écran de par sa beauté, son talent de chanteuse et danseuse, et le charisme qu’elle déploie dans les registres du burlesque comme de l’émotion. D’aucuns rétorqueront que Tony Gatlif ne se renouvelle pas et réalise toujours le même film mais on aurait tort de bouder le charme réel de ce road movie coloré et attachant.

Gérard Crespo



 

 


1h37 - France - Scénario : Tony GATLIF - Interprétation : Maryne CAYON, Daphne PATAKIA, Simon ABKARIAN.

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