« Il faut être être deux pour faire un homme et un pour mourir »

Après le décès d’Addie Bundren (Beth Grant), son mari et ses cinq enfants entament un long périple à travers le Mississippi pour accompagner la dépouille jusqu’à sa dernière demeure. Anse, le père (Tim Blake Nelson), et leurs enfants Cash (Jim Parrak), Darl (James Franco), Jewel (Logan Marshall-Green) , Dewey Dell (Ahna O'Reilly) et le plus jeune, Vardaman, quittent leur ferme sur une charrette où ils ont placé le cercueil. Chacun d’eux, profondément affecté, vit la mort d’Addie à sa façon. Leur voyage jusqu’à Jefferson, la ville natale de la défunte, sera rempli d’épreuves, imposées par la nature ou le destin. Mais pour ce qu’il reste de cette famille, rien ne sera plus dangereux que les tourments et les blessures secrètes que chacun porte au plus profond de lui…

Cette adaptation du roman Tandis que j'agonise de William Faulkner est le premier long métrage de James Franco, surtout connu jusqu'à présent comme interprète de films aussi divers que Spider-Man, Harvey Milk ou bien encore 127 heures.

À l'instar d'un Ben Affleck, le comédien continue de casser son image un peu lisse de beau gosse hollywoodien pour s'affirmer comme un acteur convaincant et surtout un metteur en scène audacieux, loin des modes et produits culturels consensuels. Il était pourtant hasardeux de s'attaquer à ce monument de la littérature américaine, composé d'une soixantaine de chapitres où de multiples narrateurs s'expriment dans des pensées plus ou moins touffues. James Franco s'en tire avec honneur, et s'inscrit dans la mouvance d'un certain cinéma indépendant post-malickien, incarné depuis quelques années par Jeff Nichols (Take Shelter) ou David Lowery (Les Amants du Texas). Nature omniprésente, voix off introspective et absence de psychologie sont ainsi les marques de ce récit très sombre, antithèse de l'american way of life, suscitant une émotion visuelle davantage que narrative. Si le résultat est parfois inégal, Franco abusant du split screen et autres ralentis, As lay for dying n'en révèle pas moins un auteur singulier dont on attend avec intérêt les prochains frottements avec d'autres classiques de la littérature.

Gérard Crespo