Les Apaches
de Thierry de Peretti
Quinzaine des réalisateurs


Sortie en salle : 14 août 2013





Ô Corse, île d'amour...

C’est l’été à Porto-Vecchio (Corse). Quatre jeunes âgés de dix-sept à dix-neuf ans, Aziz, Hamza, François-Joseph et Jo, traînent ensemble. Un soir d’ennui, Aziz conduit les autres dans la villa où son père travaille de jour comme agent d’entretien. Il sait comment entrer. La bande passe une partie de la nuit dans la luxueuse demeure encore inoccupée. Avant de partir, ils volent quelques objets sans valeur et deux fusils de chasse. Quelques jours plus tard, la propriétaire de la maison débarque de Paris et se plaint du cambriolage auprès d’une de ses connaissances, un petit caïd local... Voilà un premier film prometteur et percutant. Thierry de Peretti, cinéaste corse, utilise la ville de Porto-Vecchio et ses environs sans user des clichés touristiques et des préjugés mafieux liés à la région. Les ados décrits par le cinéaste sont les dignes descendants des personnages de Los Olvidados (Luis Buñuel 1950) et des antihéros du cinéma anglais de Ken Loach ou de l'univers des frères Dardenne. Pourtant, c'est bien dans la villa cossue d'une Parisienne en vacances qu'une grande partie de l'action a lieu et nous sommes face à un univers clandestin décrit par le réalisateur : les policiers nationaux ne sont pas les bienvenus pour régler les problèmes locaux et l'auteur est habile à décrire le communautarisme d'une partie de la population, toisant les « gaulois » (continentaux) et peinant à assurer une existence décente.

Le personnage de François-Jo (François-Joseph Cullioli) est ici le plus emblématique et attachant. Jeune homme frustré de ne pouvoir emmener au restau « sa meuf » (Marine Cayon), il a de furtives relations sexuelles avec elle dans la résidence hôtelière où celle-ci est engagée provisoirement, la belle réalisant que son avenir professionnel et personnel n'est pas sur cette île. Aussi, quand un fusil volé est estimé d'une valeur de 30 000 euros sur le Net, il ne faudra pas hésiter à se mouiller... Le sous-prolétariat (marocain) auquel appartiennent Aziz et sa famille hiérarchise davantage les rapports de classe, qui culminent dans la séquence finale (magistrale) : des minets BCBG s'amusant autour d'une piscine finiront pas toiser d'un regard stigmatisant l'intrus de la party, la culture jeune ne suffisant pas à créer une solidarité de classe d'âge...

Thierry de Peretti excelle à créer une atmosphère et à mélanger les genres, une sinistre virée de vengeance donnant au récit une tonalité policière digne de Gomorra. Loin des clichés d'un certain cinéma à prétention sociologique ou donneur de leçons, Les Apaches est un film subtil et maîtrisé qui révèle la patte d'un véritable auteur.

Gérard Crespo


 

 


1h30 - France - Scénario : Thierry de PERETTI, Benjamin BAROCHE - Interprétation : François-Joseph CULLIOLI, Aziz EL ADDACHI, Hamza MEZZIANI, Joseph-Marie EBRARD, Michel FERRACCI, Marine CAYON, Danielle ARBID.

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