The day he arrives
Matins calmes à Séoul
Book chon bang hyang

de Hong Sang-soo
Sélection officielle
Un certain regard



Sortie en salle : 16 mai 2012




« Notre vie est constituée de choses aléatoires »

En arrivant à Séoul, Seongjun tente en vain de joindre un ami au téléphone, rencontre par hasard une actrice qu'il connaissait, et boit quelques verres dans un bar avant d'être invité par des étudiants. Des événements relativement similaires se reproduiront le lendemain, à moins qu'il ne s'agisse d'un autre jour... Depuis Le jour où le cochon est tombé dans le puits et Le pouvoir de la province de Kangwon, Hong Sang-soo poursuit une œuvre cohérente mais inégale : les personnages et situations qu'il crée semblent a priori procéder de l'improvisation et du hasard, mais il est clair que le réalisateur adopte une esthétique calculée de manière complexe et détaillée. Le jour où il arrive n'échappe pas à la règle et pourrait constituer un beau triptyque avec Les femmes des mes amis et Ha Ha Ha, ses deux précédents films. Au niveau narratif, on retrouve ces figures récurrentes du cinéma de Hong Sang-soo : cinéastes ratés, professeurs et étudiants en cinéma, jeunes coquettes adonnées aux minauderies... Cette galerie d'éternels adolescents se livrant à des marivaudages ou professant des aphorismes autour d'une bouteille de saké devient aussi familière que les chevauchées et saloons chez John Ford où les repas de famille provinciaux chers au regretté Chabrol.

Sur le plan de la forme, Hong Sang-soo adopte à nouveau le (très beau) noir et blanc et joue avec les effets en trompe-l'œil et les mises en abîme : dès la première séquence, la voix off du personnage principal nous informe qu'il passera « trois-quatre jours » à Séoul. En apparence, il semble avoir séjourné cette durée mais l'incertitude nous saisit à plusieurs reprises. Le labyrinthe temporel est certes moins ardu que dans L'année dernière à Marienbad mais le cinéaste est habile dans l'art d'instaurer des doutes et d'incorporer des séquences à la frontière du rêve et de l'inconscient. Hong Sang-soo ne se prend cependant ni pour Tsui Hark ni pour son compatriote Park Chan-wook (Thirst) : l'interaction de facteurs invisibles et d'éléments de réalisme n'entraîne jamais de mélange des genres et on est bien en terrain connu : celui de la chronique romanesque à forte tonalité littéraire, au sens de la « caméra stylo » chère à Astruc et mise en pratique par un Rohmer. Aussi prolifique que Kim Ki-duk (Arirang), Hong Sang-soo s'en distingue par l'absence de panne d'inspiration créatrice. On pourra objecter que son cinéma tourne en rond et qu'il réalise toujours le même film. Il n'empêche, sa petite musique secrète un charme intact.

Gérard Crespo


1h38 - Corée du Sud - Scénario : HONG Sang-soo - Interprétation : Junsang YU, Sangjoong KIM.

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