Les Femmes de mes amis
You Don't Even Know
Jal Aljido Motamyunseo

de Hong Sang-soo
Quinzaine des réalisateurs
palme

Sortie en salle : 5 mai 2010




Conte cruel de la quarantaine

Encore méconnu, pas assez riche et désespérant d'y changer quoique ce soit à quarante ans, Ku Kyung-nam, qualifié de "réalisateur art et essai", accepte deux invitations consécutives : être jury au festival de Jecheon et donner une conférence dans son ancienne école de cinéma. Au fil des rencontres, ami(e)s de circonstance ou vieilles connaissances et au fil des beuveries, tout advient : l’espoir, la séduction, l’échec, la déprime… mais aussi parfois des douceurs plus confortables.
Tout le monde s'accorde à dire que ce fut un été à la chaleur meurtrière.

Le film réunit les deux tendances du cinéma de Hong Sang-soo. D'un côté, le cinéaste retrouve sa veine rohmérienne, révélée par La Vierge mise à nu par ses prétendants ; de l'autre, la référence à Truffaut et au cinéma dans le cinéma est manifeste, comme cela était le cas avec Conte de cinéma. Dans les deux pôles stylistiques, le spectateur reconnaîtra l'univers familier du réalisateur : beuveries entre potes et condisciples, confusion des sentiments, longs dialogues teintés de gravité et d'humour. Découpé en deux parties distinctes (la participation au festival puis la conférence et ses retombées), le récit doit son titre français à deux quiproquos exquis qui montrent notre cinéaste (raté ?) séduire avec maladresse l'épouse de son ancien collaborateur que tous les deux croient mort, et ensuite la compagne de son vieux professeur.


Dans les deux cas, l'homme est dépeint comme pitoyable, naïf et lâche, et les femmes prennent les traits de redoutables péronnelles qui ne savent pas trop ce qu'elles recherchent. La durée de deux heures, loin de nuire au charme du film, a le mérite de s'attarder sur les personnages, dans des plans-séquences d'une discrète beauté plastique (le repas sur la plage). Film de dialogues dont l'action passe par la vitalité verbale, Les Femmes de mes amis ne mérite pas de coupe au montage et vaut par sa fausse nonchalance ainsi que sa satire en filigrane d'un certain monde du cinéma. Bien sûr, tout n'est pas parfait, à l'image de ce comique de situation un brin lourdaud et de ces personnages stéréotypés (l'actrice porno qui tente de se recaser dans le cinéma d'auteur). Mais Hong Sang-soo, que l'on a connu certes plus inspiré et créatif dans Turning Gate, réalise au final une œuvre attachante et décalée, plus ou moins autobiographique, comme le cinéma coréen semble en concocter depuis déjà une bonne décennie.

Gérard Crespo


2h06 - Corée du Sud - Scénario : - Interprétation : HA Jung-woo, KIM Tae-woo, KONG Hyeong-jin, GO Hyun-jung, UHM Ji-won.

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