Le P'tit Tony Little Tony (Klein Teun) - de Alex van Warmerdam avec Annet Malherbe, Ariane Scluter, Alex van Warmerdam... Sélection officielle Un Certain Regard |
Le plat pays qui est le sien, Alex van Warmerdam le filme dans une crudité désolée, plombée par la lumière zénithale qui plante le cadre : une ferme hollandaise proprette avec une cour pour horizon et une grange pour tout relief. De cette peinture naïve, figurative, le générique propose une amusante représentation bucolique... C'est du cinéma "essentiel", qui édulcore toute fioriture. La mise en scène d'une grande rigueur se fait discrète. la caméra suit les personnages lorsqu'ils évoluent, elle est fixe quand ils le sont : une façon de leur laisser toute latitude. Le spectateur ne se voit rien imposer non plus : pas de sentiment ni de parti pris qui viserait à l'appropriation des protagonistes. Non, dans Klein Teun, on ne s'attache à rien ni à personne : on regarde, on ne touche pas. |
Et pourtant, les plans s'échaffaudent ; mais chaque fois, le réalisateur change de cap pour nous tenir en éveil. Il s'agit là de petites choses de la vie, mais le pari est de la donner à voir en grand angle : l'histoire de Brand (Alex van Warmerdam lui-même) lorsqu'on y pénètre, est celle d'une vie morne avec sa femme Keet (Annet Malherbe). Elle, semble sortie d'un tableau de Botero : une maîtresse femme, digne, corpulente, qui travaille en ville. Lui est fermier, analphabète. Keet le pousse à prendre des leçons à domicile avec la jeune et belle Lena (Ariane Schluter). S'installera une relation triangulaire dont les rebondissements ne laissent aucun répit. Un petit Tony viendra même au monde sur le terreau de cette trinité. |
L'atmosphère si particulière que nous a distillée le réalisateur nous imprègne longtemps après la projection car la fin du film déroute. On sort de la salle libéré, mais on garde dans les plis de sa mémoire comme une vague amertume qui dérange. Nicolas Fine
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