Petra |
Les mauvaises intentions Petra, jeune artiste peintre, n’a jamais connu son père. La quête de ses origines la mène jusqu’à Jaume Navarro, un plasticien de renommée internationale. Ce dernier accepte de l’accueillir en résidence dans son atelier, perdu dans les environs de Gérone. Petra découvre alors un homme cruel et égocentrique, qui fait régner parmi les siens rancœur et manipulation. Espérant des réponses, la jeune femme consent à se rapprocher de cette famille où dominent les non-dits et la violence. Petra trouvera-t-elle vraiment ce qu’elle est venue chercher ? Petra est le cinquième film de Jaime Rosales présenté au Festival de Cannes. Nous avions particulièrement apprécié La Horas del dia, défendu par Nicolas Fine, et La Belle jeunesse, dont Xavier Affre précisait qu’il s’agissait « d’un cinéma du réel, sans emphase ni effets, à mi-chemin entre la fiction et le documentaire ». Le présent opus est sans doute son meilleur film, la dimension fictionnelle voire onirique prenant plus de poids que la veine naturaliste du cinéaste. On pourrait penser à un métrage sur l’univers désabusé des artistes, partagés entre le caractère personnel de leur inspiration et les nécessités commerciales. Ce prétexte narratif n’anime que le début d’une œuvre qui devient très vite un puzzle déconcertant et excitant, au carrefour de la gravité de la tragédie antique et des rebondissements des télénovelas. |
Découpé en plusieurs chapitres dont certains brisent la linéarité et confèrent un nouvel éclairage aux scènes qui précèdent, Petra pourra paraître austère à certains, par son style froid et épuré, et sa description psychologique de personnages pris dans un engrenage de noirceur. Mais pour qui apprécie les univers de Haneke ou Oliveira, le film exercera une fascination certaine, d’autant plus qu’un suspense quasi policier relance constamment l’attention : « Du point de vue économique, je voulais faire un film séduisant pour un public plus large (…) sans pour autant perdre ma personnalité, ma radicalité », a précisé Jaime Rosales. Petra est en outre réussi dans le filmage de ses espaces, tant intérieurs qu’extérieurs, surtout quand le réalisateur plante des personnages sophistiqués dans un cadre rural dans lequel ils détonent, le rapport artificiel avec la campagne renforçant un subtil effet de décalage. Les acteurs se meuvent avec aisance dans ce dispositif, à commencer par Bárbara Lennie, récemment appréciée dans Everybody Knows. Elle est bien épaulée par Alex Brendemühl (Mal de Pierres), et la divine Marisa Paredes, que l’on a plaisir à revoir, sept ans après La Piel que habito.
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1h47 - Espagne, France, Danemark - Scénario : Jaime ROSALES, Clara ROQUET, Michel GAZTAMBIDE - Interprétation : Bárbara LENNIE, Alex BRENDEMÜHL, Marisa PAREDES, Joan BOTEY, Oriol PLA, Carme PLA. |