Que le spectacle commence
All That jazz
de Bob Fosse
Sélection officielle
Cannes Classics






La danse de l'amour et de la mort

Une présentation de Park Circus. Restauration 4K menée par Twentieth Century Fox et the Academy Film Archive en collaboration avec The Film Foundation. Restauration à partir du négatif caméra original chez Sony Colorworks à Culver City, Californie.

Joe Gideon (Roy Scheider) est un artiste surmené, pris entre les auditions et les répétitions de son prochain ballet à Broadway, le tournage et le montage de son film, et une vie familiale complexe entre sa femme, sa fille et sa maîtresse. L'angoisse et la frénésie de créer finissent par le conduire à une mise en scène délirante et inspirée de sa propre mort... All That Jazz est, avec Cabaret, le film le plus célèbre de Bob Fosse, cinéaste, danseur et chorégraphe, à qui l'on doit également Sweet Charity, Lenny et Star 80. Entièrement tournée en studio, ne comprenant aucune scène d'extérieur, l’œuvre est à la fois l'aboutissement et le testament d'une filmographie majeure dans le genre de la comédie musicale. Encore que le terme « comédie » n'est pas très adapté à cet ultime opus, en dépit de moments sarcastiques où l'humour est certes présent, mais d'une noirceur sans égale. La vie et l’œuvre de Joe Gideon ont une évidente tonalité autobiographique, Bob Fosse ayant consacré son existence à l'industrie du spectacle et ayant dû concilier liberté créatrice et pression financière des producteurs, foisonnement artistique et vie privée autodestructrice, l'alcool et le sexe ayant stimulé son énergie tout en l'ayant précipité dans un gouffre insondable.

L'une des forces de All that Jazz est de traiter les thèmes de la maladie et de la mort dans un style flamboyant, avec une énergie fantaisiste dans les dialogues, les ballets et la mise en scène en général. Si l'on n'est pas dans la veine mélodramatique et tragique d'Une chambre en ville de Jacques Demy, l'autre musical culte des années 80, le cinéaste assume le caractère morbide des situations, pour mieux les magnifier dans un montage visionnaire et fantasmagorique, écho relatif aux cinémas d'Ophuls ou Fellini : Joe Gideon/Bob Fosse s'exhibe dans un show introspectif, de la même façon que l'auteur de Lola Montès mettait en scène un Monsieur Loyal qui lâchait dans l'arène Martine Carol, ou à l'instar du maestro italien traquant la déchéance de Casanova. All that Jazz, qui aurait pu tomber dans le mauvais goût et le clip publicitaire narcissique, est d'une beauté troublante, et fascine par sa narration éclatée, ses mises en abyme vertigineuses, et des images qui restent gravées dans les mémoires, du baiser à une mourante sur un lit d'hôpital au bras tendus par la Mort : cette dernière a les traits élégants de la belle Jessica Lange, tissant sa toile avec autant de détermination que Maria Casarès dans Orphée... Poème d'amour et de mort, All That Jazz séduisit le jury du Festival de Cannes 1980, présidé par Kirk Douglas, qui lui décerna la Palme d'or, ex-æquo avec Kagemusha d'Akira Kurosawa.

Gérard Crespo




 

 


1979 - 2h03 - États-Unis - Scénario : Bob FOSSE, Robert Alan AURTHUR - Interprétation : Roy SCHEIDER, Jessica LANGE. Leland PALMER, Ben VEREEN, Ann REINKING, Erzsebet FOLDI, Michael TOLAN, Deborah GEFFNER, Anthony HOLLAND, David MARGULIES, John LITHGOW.

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