Santi-Vina
de Thavi Na Bangchang
Sélection officielle
Cannes Classics







Les yeux de l’amour

Santi est un pauvre garçon aveugle de dix ans qui vit avec son père. Vina prend pitié de lui et tente de le protéger de Krai. En grandissant, Santi et Vina deviennent amoureux. Krai, jaloux, aime aussi Vina. Les jeunes gens décident de s'enfuir mais ils sont capturés... Il s’agit du premier film en couleur thaïlandais. Le matériau original, considéré comme perdu, fut retrouvé en 2014 au British Film Institute, ainsi qu’à la China Film Archive et au Gosfilmofond en Russie. Du coup, sa restauration, menée au laboratoire L’Immagine Ritravota, a été entreprise à l’initiative de Film Archive (Public Organization) en Thaïlande. L’œuvre est un beau mélodrame, dont la simplicité apparente cache une subtile réflexion sur l’intolérance et la stigmatisation, dans le cadre d’une Thaïlande rurale qui aspire au bouddhisme. Le handicap de Santi est aux yeux de la société un obstacle de poids à son union avec Vina, et le bonheur des amoureux est sacrifié au profit de l’ordre moral et du respect des convenances.

Loin de bâtir un récit édifiant, le cinéaste propose un film sobre et pudique, à l’émotion contenue, et magnifié par quelques passages chantés et musicaux qui créent un certain décalage. La référence à la religion, si elle ne constitue pas le cœur de la narration, n’en est pas moins frontale. On est là face à un cinéma populaire de qualité, et Santi-Vina fut l’un des rares films thaïlandais de l’époque à avoir connu le succès populaire tout en ayant obtenu des prix internationaux. Il faut être reconnaissant à Cannes Classics d’avoir présenté cette rareté, véritable pépite pour le cinéphile, qui ne connaît de la cinématographie thaïlandaise que les splendides œuvres ésotériques d’Apichatpong Weerasethakul (Oncle Boonmee...) ou les films de petits maîtres tels Pen-Ek Ratanaruang (Last Life in the Universe) ou les frères Pong (Bangkok Dangerous). On regrettera juste que sa projection cannoise ait été effectuée un peu à la sauvette, uniquement en anglais et sans dossier de presse, privant les festivaliers d’informations plus complètes sur le film, notamment ses conditions de tournage.

Gérard Crespo



 

 


1954 - 1h54 - Thaïlande - Scénario : Robert G. North, Thavi NA BANGCHANG, Vijit KUNAVUDHI - Interprétation : Poonpan RANGKHAVORN, Rayvadi SRIWILAI.

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