Welcome, or No Trespassing |
Les jolies colonies de vacances D'Elem Klimov, les cinéphiles occidentaux connaissent surtout ses deux derniers longs métrages, Les Adieux à Matiora et Requiem pour un massacre, découverts pendant la perestroïka. Cet ancien ingénieur en aéronautique qui obtint en 1964 le diplôme de l'Institut moscovite d'études cinématographiques avait fait ses armes dans la réalisation la même année avec Welcome, or No Trespassing, également référencé sous le titre français Soyez les bienvenus, entrée interdite aux étrangers. Jamais distribué en France, le film a été présenté dans une copie restaurée à Cannes Classics et est également visible sur YouTube, dans une version russe non sous-titrée. C'est un petit bijou qui sous l'apparence d'un divertissement pour enfants est une charge féroce contre la bureaucratie. Dans un camp de vacances pour la jeunesse du peuple, Dynin, le directeur rigide, met en place un règlement sévère que nul ne doit transgresser. Entre jeux balisés et baignades sous haute surveillance, le petit Inochkin se risque à nager hors de la zone autorisée. Renvoyé immédiatement au bercail, le jeune garçon redoute que sa grand-mère ne l'apprenne et en meure de chagrin. |
Il décide alors de se cacher dans le camp, protégé par ses camarades... La suite de l'intrigue est menée à un rythme sans failles, où les trouvailles visuelles (les envolées finales) sont combinées à un hommage au cinéma burlesque muet (les accélérés, les intertitres), le tout avec un art du montage et une liberté de ton qui ne sont pas sans évoquer Zéro de conduite de Jean Vigo ou Zazie dans le métro de Louis Malle. Il faut croire qu'en haut lieu d'aucuns se sont sentis visés par les dénonciations du récit, puisque sans être ouvertement censuré, le film suscita des réticences face à un personnage de chef qui condamne la poésie de Maïakovski et incite à la délation, avant de voir son autorité chanceler... Moins célèbre que Tarkovski, Paradjanov et autres cinéastes de sa génération, Elem Klimov mérite d'être (re)découvrir. Certains cinéastes contemporains lui vouent une grande admiration et il est fort probable que Wes Anderson ait été influencé par ce premier long métrage pour le scénario et la démarche stylistique de Moonrise Kingdom. Gérard Crespo
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1964 - 1h14 - URSS - Scénario : Semyon LUNGIN, Ilya NUSINOV - Interprétation : Evgeniy EVSTIGNEEV, Arina ALEYNIKOVA, Ilya RUTBERG. |