Mon Roi
de Maïwenn
Sélection officielle
En Compétition

Prix d'interprétation féminine (Emmanuelle Bercot)


Sortie en salle : 21 octobre 2015



Rien ne sert de courir

Tony (Emmanuelle Bercot), une avocate, intègre un centre de rééducation après un grave accident de ski. Dépendante du personnel médical et des antidouleur, elle se souvient de sa relation tumultueuse avec Georgio (Vincent Cassel), avec qui elle a vécu pendant des années. « Pourquoi se sont-ils aimés ? Qui est réellement l’homme qu’elle a adoré ? Comment a-t-elle pu se soumettre à cette passion étouffante et destructrice ? »... Tony entame alors une reconstruction tant physique que psychologique, et ce travail corporel et mental lui permettra peut-être de se libérer... Le spectateur lui, ne le sera qu'au bout de cent trente minutes éprouvantes de guimauve et d'hystérie, épuisé par les maniérismes d'une caméra portée et des dialogues de roman-photo. Écrit avec Étienne Comar, producteur et scénariste de Des hommes et des dieux, Mon roi est le quatrième long métrage de Maïwenn, dont elle a confié le rôle principal à la coscénariste de Polisse, son film précédent. La photo est signée Claire Mathon, qui a également été chef-opérateur pour Les Deux amis de Louis Garrel, qui interprète ici le frère bienveillant de Tony. De ces rencontres artistiques et techniques en réseau, on aurait pu attendre une effervescence créatrice et une sincérité dans les intentions. Le résultat nous semble tout le contraire. Maïwenn aspire désormais à être une réalisatrice à succès, héritière des Lelouch et Beineix qui ont fait la gloire d'un certain cinéma populaire français. Ce qui est strictement son droit. Mais tout sonne faux dans son dernier opus, comme si les défauts que l'on percevait dans Polisse (par ailleurs estimable) étaient accentués à outrance.

Maïwenn est experte dans la manipulation du spectateur, comme d'autres (Marc Levy, Guillaume Musso), caressent leurs lecteurs dans le sens du poil, mais avec plus de talent. Vous voulez une touche d'émotion ? On livre un bébé à qui toute la famille réconciliée fait risette. Vous souhaitez vous divertir pendant ce récit oppressant ? Les dialoguistes sortent de leur chapeau la réplique qui fera forcément mouche, Maïwenn sachant très bien que le volume sonore des rires est amplifié dans le Grand auditorium Lumière. Et elle pimente de gags de sitcom son soap opera branché, avec l'élégance d'une Maïté déposant des anchois sur un gigot d'agneau. Le récit est d'une rare vacuité, tant il est clair que Georgio est présenté d'emblée comme un abruti égocentrique et menteur, ce qui saute aux yeux de tous sauf de Tony. Quant à la structure en flash-back, qui aurait pu donner un décalage au récit, elle ne fait que le plomber davantage, les séquences de rééducation accumulant elles aussi les invraisemblances (l'amitié avec les jeunes banlieusards). Rien ne sert de courir : tel devait être le titre initial. Il convenait pourtant parfaitement à un produit tout en démesure. Un mot enfin sur le scandale du (demi)-prix d'interprétation féminine. Alors qu'Emmanuelle Bercot a présenté hors-compétition son excellent long métrage La Tête haute, la primer en tant qu'actrice dans un rôle où elle alterne hystérie et fausseté de jeu est d'une cocasserie extrême, sa prestation étant du niveau de son pathétique discours lors de la cérémonie de clôture. Le Jury avait pourtant le choix entre plusieurs comédiennes remarquables, dont Cate Blanchett, Margherita Buy, Shu Qi, Zhao Tao, Ayase Aruka ou Emily Blunt.

Gérard Crespo

 



 

 


2h10 - France - Scénario : Etienne COMAR, MAÏWENN - Interprétation : Vincent CASSEL, Emmanuelle BERCOT, Louis GARREL, Isild LE BESCO, Ludovic BERTHILLOT, Romain SANDÈRE, Camille COTTIN, Michael EVANS, Paul HAMY, Norman THAVAUD.

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