L'honneur d'un capitaine

Capitaine à bord de porte-containers, Marco Silvestri (Vincent Lindon) rentre d'urgence à Paris. Sa sœur Sandra (Julie Bataille) est aux abois : un mari suicidé (Laurent Grévill), une entreprise en faillite et une fille à la dérive (Lola Créton). Sandra désigne le coupable : l'homme d'affaires Edouard Laporte (Michel Subor). Marco loue un studio dans l'immeuble où Laporte a installé Raphaëlle, sa maîtresse (Chiara Mastroianni) et leur fils. Ce que n'avait pas prévu Marco, ce sont les omissions et les secrets de Sandra qui brouillent la donne... Et l'amour de Raphaëlle qui pourrait tout faire basculer.

De l'auteure de Beau travail et White Materials, habituée des récits d'atmosphère hors des sentiers balisés, on attendait certes une œuvre qui tranche avec la production courante, aussi bien du cinéma commercial que des films indépendants. La déception n'en est que plus grande. Non que Les salauds soit académique et convenu. La sincérité de sa démarche stylistique est indéniable.

Fidèle à son sens des ellipses et des non-dits, Claire Denis n'en signe pas moins une œuvre terriblement molle et sans âme, dont la première partie ressemble aux rushes d'un film inachevé. Ce récit d'une vengeance familiale, axé sur une vague trame policière, n'évite aucun poncif d'un certain cinéma français contemporain, un scénario bâclé et faussement sulfureux étant combiné à un filmage chichiteux. Le jeu distancié et atonal de comédiens que l'on a connus brillants dans d'autres films n'arrange rien. Vincent Lindon est plus limité que prévu et son couple avec Chiara Mastroianni est aussi improbable que celui qu'il formait avec Valérie Lemercier dans Vendredi soir (2002), de la même cinéaste.

Bien sûr, la photo d'Agnès Godard est toujours aussi splendide, et l'on trompera son ennui en guettant certains seconds rôles apparaissant sur l'affiche. Alex Descas en médecin ou Grégoire Colin en petite frappe sauvent quelques scènes par leur seule présence, ce qui est bien peu eu égard à la faiblesse de l'ensemble du film.

Gérard Crespo