Prenez le métro

Lauréat au Sundance film festival, Fruitvale station est tiré de l’histoire vraie d’Oscar Grant, victime d’une très grosse bavure policière, raciste et flagrante. Doublée d’une bavure judiciaire puisque le flic assassin, prétendant simplement s’être trompé d’arme (il a cru que c’était son flashball !), a du coup été jugé pour homicide involontaire, écopant de deux ans, réduits à dix-huit mois de prison. L’affaire avait fait du bruit en son temps, l’agression et le meurtre ayant été filmés par de nombreux témoins avec leurs portables et diffusés sur le Net.

Ce sont ces images, chaotiques, qui ouvrent le film, avant que de revenir sur cette journée du 31 décembre 2008, où Oscar, citoyen d’Oakland, belle gueule (Michael B. Jordan), 22 ans, en couple avec Wanda et père d’une petite fille de 4 ans, s’applique à rester sur la voie délicate de la réinsertion qu’il a décidé de ne plus quitter, malgré son immaturité et la tentation toujours latente de renouer avec son récent passé de petit dealer.

En cette veille de Jour de l’An, il sera bon fils, bon compagnon, bon petit-fils, bon père, ami des bêtes… C’est beaucoup pour un seul homme et on ne peut qu’espérer – sans trop y croire – que Ryan Coogler n’ait pas grossi le trait (les traits) du vrai Oscar Grant. Il est évident que, que la victime soit ange ou démon, rien ne pouvait excuser une telle exécution.

Oscar, Wanda et des amis ont donc décidé d’aller voir le feu d’artifice de minuit à San Francisco, de l’autre côté de la baie et la mère d’Oscar leur conseille de s’y rendre en métro, au cas où ils auraient un peu trop arrosé la soirée.

Le métro tombe en panne à Fruitvale station et le compte à rebours est égrené et fêté dans la rame, où Oscar est agressé par un ex-taulard. Un simple hasard, un accrochage bénin qui déclenche une descente de police musclée, hurlante, effrayante jusqu’à l’issue fatale. La scène, nerveuse, implacable, paranoïaque, film le triptyque policiers - interpelés - témoins avec une rare virtuosité, débordant de haine, de terreur, de panique et de révolte.

Marie-Jo Astic