La Danza de la realidad
de Alejandro Jodorowsky
Quinzaine des réalisateurs


Sortie en salle : 4 septembre 2013




« M'étant séparé de mon moi illusoire, J'ai cherché désespérément un sentier et un sens pour la vie »

Âgé de quatre-vingt quatre ans, Alejandro Jodorowsky signe avec ce récit foisonnant son meilleur film, que d'aucuns ont considéré comme le testament d'un artiste visionnaire. Auteur de trois œuvres cultes (El Topo, 1970 ; La Montagne sacrée, 1973 ; et Santa Sangre, 1989), il a donné libre cours à son goût pour un cinéma fantasmatique à prétentions philosophiques, se définissant lui-même comme « pseudo-magicien ». La Danza de la realidad est d'une invention visuelle indéniable, et l'on se plonge avec émerveillement dans cette histoire d'un enfant juif victime de la brutalité de son père, un commerçant immigré admirateur de Staline, matérialiste convaincu, et persuadé qu'il doit tuer le dictateur local. Si Jodorowsky semble régler ses comptes avec un passé familial douloureux, le film transcende l'aspect autobiographique et adopte dès les premières images une veine fantaisiste et surréaliste. Des personnages sortis d'un univers pictural psychédélique traversent l'écran : nains vociférant contre la vie chère, estropiés grandioses que l'on croirait sortis de Freaks, pompiers antisémites ou prostituées généreuses se succèdent dans un foisonnement esthétique et narratif qui n'est pas sans rappeler le Fellini de Amarcord.

Un humour tout buñuélien fait passer les situations les plus saugrenues, d'un concours de costumes canins aux délires de la mère, persuadée que son fils est la réincarnation du père qu'elle a vu disparaître dans sa jeunesse. Ce jeu de faux-semblants et mises en abyme est d'ailleurs récurrent dans l'ensemble du film, ne serait-ce que par les choix de casting, le propre fils de Jodorowsky incarnant le père du cinéaste, et le réalisateur lui-même apparaissant dans plusieurs séquences.

Avec une économie de moyens et des techniques artisanales, La Danza de la realidad regorge de créativité jusque dans ses délires fantastiques, qui s'avèrent présenter l'inconscient et les traumatismes des protagonistes (la scène de l'enterrement). Sans tomber dans les pièges du pittoresque ou de la lourdeur symbolique, Jodorowsky se révèle dans l'accomplissement de son art.

Gérard Crespo

 

 


2h10 - Chili - Scénario : Alejandro JODOROWSKI - Interprétation : Brontis JODOROWSKY, Pamela FLORES, Jeremias HERSKOVITS.

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