Une journée d’été ordinaire. Une caserne militaire ordinaire. Puis, un trajet en bus, des soldats ordinaires qui ne savent pas où ils vont et ce qui les attend. C’est pourtant le début d’une déshumanisation barbare, d’une atmosphère pesante et violente.
Dzoni est militaire engagé depuis peu de temps et par hasard, dans un pays en guerre. Rejeté par ses camarades, il supporte de passer toujours après les autres et de servir de cobaye à son supérieur. Il ne faut pas poser de questions, juste exécuter les ordres, sans chercher à comprendre. Un matin, on conduit les soldats dans une ferme abandonnée, où on leur laisse quartier libre. C’est à partir de là que la machine infernale va s’emballer. Les meurtres de prisonniers de guerre vont devenir aussi banals que de fumer une cigarette à l’ombre d’un arbre. Dzoni ne s’en sent pas capable, mais sous la pression de son chef, il obéit, tire, mais tourne la tête pour ne pas regarder ce qu’il fait. Plus les camions de prisonniers et les exécutions s’enchaînent, plus le personnage principal s’enfonce dans l’horreur, une horreur qu’il a créée lui-même et alimentée par de longues gorgées de vodka.
Pour le spectateur, c’est une claque dans la figure. On ne comprend pas pourquoi la violence se décuple ; on est déstabilisé par ces crimes banalisés, qui se déroulent dans une campagne bucolique très reposante. Le déroulement de la situation prend une forme cyclique : cigarette, alcool, puis exécution. C’est un cercle vicieux, une descente aux enfers que le protagoniste ne pourra plus quitter, une habitude morbide à laquelle il s’est résigné. Les coups de feu, de plus en plus nombreux, nous font sursauter, comme si c’était nous qui venions de tirer.
Ordinary People de Vladimir Perisic dure 80 minutes et donne pourtant l’impression de s’éterniser. Son atmosphère est étouffante, déroutante. L’histoire, les plans, les décors, tout prend une perspective linéaire. La lumière vive, forte, donne une impression de quiétude, et illumine cette campagne meurtrière. La déshumanisation est devenue générale et normale pour ces soldats, mais jusqu’où iront-ils ?
Marlyne Spendeler et Laura Desèbe, Lycée Louis Armand de Chambéry
Saviez-vous que tuer pouvait prendre moins de temps que fumer une cigarette ?
C'est ce que veut nous faire comprendre Vladimir Perisic, réalisateur du film, en mettant en scène un homme ordinaire dans une situation extraordinaire : la guerre.
Dzoni, interprété par Relja Popovic, est un soldat qui, par son « métier », va devoir tuer. Cette jeune recrue, non pas décrite comme monstrueuse mais comme une personne normale voire banale, va devoir se retrouver face à un conflit intérieur. Petit à petit, sa conscience le quitte et il se met à tuer mécaniquement sans plus se poser de questions. Le spectateur lui-même se détache de la psychologie du personnage pour pouvoir se concentrer sur le visuel du film.
Peu à peu, ses victimes sont déshumanisées, privées d'identité. Le protagoniste ne portera pas le moindre regard sur sa dernière victime, un jeune adolescent qui tente pourtant de se tourner vers lui. Le meurtre se banalise.
Les scènes sont très longues pour un film plutôt court. La chronologie nous montre qu'à temps égal, des actes très différents peuvent se produire. Tuer quelqu'un n'est pas plus long que boire une gorgée d'eau-de-vie.
Se pose alors la question de l'individualité face à un groupe tel que l'armée qui pousse l'individu au conformisme. Dzoni, au final, ne veut que s'intégrer à ses camarades de l'armée.
Le réalisateur nous affirme que deux éléments peuvent être à l'origine de la violence : l'incompréhension et la peur. Et tout le monde peut se retrouver dans ce genre de situation.
Alors finalement, Dzoni pourrait être n'importe qui. Votre épicier, votre voisin de palier, votre ami... Vous?
Erwin Etsi et Hana Cherrat, Lycée Marcelin Berthelot de Pantin
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Debout soldats !
Debout soldats !.Dans une caserne, les militaires obéissent aux ordres. Un homme ordinaire, Dzoni, jeune soldat se retrouve confronté à une réalité violente et cruelle. Comment suivre les ordres de la hiérarchie lorsqu’il s’agit de mettre un terme à la vie d’un homme ? C’est sur ce jeu de contraste que le réalisateur Vladimir Perisic nous donne cette impression puissante et forte d’assister à l’évolution de la violence du soldat.
La nature (un trou de verture) est magnifiée, tandis que la nature humaine est confrontée aux ordres et compromise par le devoir. Contraste encore lorsque la réalité est acceptée, presque choisie mais jamais regardée de face : le jeune soldat détourne les yeux puis s’adonne à la tâche mais boit. Les dialogues presque inexistants (il s’agit pour la plupart du temps d’ordres que le chef veut faire exécuter) et le silence perturbé par les coups de feu rythment le film. Les instants de latence et de torpeur pesante nous enveloppent et sont nÈcessaires à la cohérence de l’œuvre.
Grâce aux plans qui mettent en évidence les perceptions et les sensations de l’exécuteur (vue des soldats alignés de profil qui insiste sur la chair ressortant du visage) on assiste peu à peu à la déshumanisation du protagoniste qui nous paraissait proche et humain au départ. Mais Dzoni appuie sur la gachette et ce sont nos préjugés qui s’ébranlent : le monstre est un homme ordinaire. Et, en un seul jour, quelques exécutions accomplies tiennent jusqu’à la fin sa conscience meurtrie.
Elsa Mokhrane, Lycée Paul Valéry de Sète
Une campagne. Des hommes. Leur tâche : tuer. Les corps tombent, leurs visages restent de marbre.
Une scène d’exécution où la sensibilité disparaît derrière l’automatisme du geste. Ou comment des anges se métamorphosent involontairement en démons.
Le premier long-métrage du cinéaste serbe Vladimir Perisic esquisse le tableau d’une unité de soldats pour qui la mise à mort devient acte de routine. Un héros obligé d’adopter la froideur face à sa mission, pour satisfaire son désir de faire corps avec ses camarades d’infanterie. La longueur voulue des scènes façonne une atmosphère de solitude léthargique. La journée se fait pesante, les tergiversations de l’esprit du héros autorisées par le calme d’une campagne trop isolée n’étant interrompues que par le bruit de détonations. Son comportement finira par devenir semblable à celui de ses camarades, aussi choquant qu’il puisse être. La violence, banalisée, le gagne en tant que réflexe horrifiant. Le soldat s’apparente à un individu ordinaire ne faisant que jouer à un jeu vidéo : il enchaîne tir sur tir, la mise à mort devenant la norme. Les écrans perdent progressivement toute forme d’états d’âme.
Elise Laville et Lucas Toulon, Lycée Bartholdi de Colmar.
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