Mother
de Bong Joon-ho
Sélection officielle
Un certain regard

palme




Tout sur la Mère

Bong Joon-ho est un réalisateur atypique : en trois films, il a su s’imposer comme une figure maîtresse du jeune cinéma coréen. Détournant les genres dans lesquels il inscrit ses œuvres, il a secoué les fondements du thriller dans Memories of Murder puis distillé une chronique familiale mâtinée de critique sociale et politique dans le «  film de monstres » Host au succès public historique.

Mais si ses précédents films étaient centrifuges, élargissant un thème initial en jouant de la digression, Mother est lui totalement centripète. Partant de la figure universelle de la Mère que chaque spectateur peut s’approprier naturellement, il installe un dispositif cinématographique comme – dit-il lui-même – une loupe qui fait converger les rayons du soleil en un point unique pour tout faire brûler.

Une veuve élève son fils unique Do-joon avec un inconditionnel amour maternel. À vingt-sept ans, Do-joon serait plutôt du signe benêt ascendant nigaud et pas franchement autonome. Traînant avec son copain Jin-tae, il a de quoi rendre plus qu’anxieuse sa mère pour qui il représente tout au monde. Quand une jeune fille est retrouvée morte dans une ruelle du village (superbe décor extérieur en puzzle), Do-joon est rapidement accusé de meurtre et la police ne tardera pas à classer l’affaire, aidée pour cela par un avocat dont l’incompétence affichée est un tranchant coup de lame du réalisateur. La Mère, prête à tout pour prouver l’innocence de la chair de sa chair, va user de son instinct maternel pour retrouver coûte que coûte l’assassin.


L’actrice Kim Hye-ja, à l’origine du projet du film, soixante-dix ans dont quarante-sept ans de carrière, incarne le personnage de la mère avec, au-delà de la dévotion et de la générosité déployées dans la série télévisée dont elle fut l’icône durant vingt-trois saisons, une force et une violence destructrices, nichées au plus profond de son âme triste et de son corps frêle. La danse qu’elle effectue au milieu d’un champ, encadrant le film en épanadiplose, rend compte à merveille de ce concentré d’émotion.

Contrairement à un certain cinéma coréen grand public qui, avec art il faut le dire, sait nous surprendre avec des choses que l’on attend, Bong Joon-ho, tout en maintenant une tension scénaristique d’un bout à l’autre, nous mène avec espièglerie vers une révélation ironique et implacable. Son retour à la science-fiction pour son prochain film adapté de la bande dessinée française « La Transperceneige » promet de faire le buzz alors que Mother , annoncé pour le deuxième semestre 2009, n’est encore pas sorti en France.

Jean Gouny



2h10 - Corée du Sud - Scénario : BONG Joon-ho, PARK Eun-kyo, PARK Wun-Kyo - Interprétation : WON Bin, Kim HYE-JA, JIN Ku.

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