J'ai tué ma mère
I Killed My Mother
de Xavier Dolan
Quinzaine des réalisateurs
Prix Art Cinema Award - Prix SACD - Prix Regards Jeunes
palme



Sortie en salle : 15 juillet 2009


J'ai tué ma mère retrace la vie de Hubert Minel, qui, du haut de ses seize ans, déteste sa mère, Chantal. Pour se libérer de cette relation qui se détériore chaque jour, le jeune homme évite au mieux celle qui l'a mis au monde en allant chez son copain Antonin, avec qui il vit une histoire d'amour depuis deux mois. Il se lie également d'amitié avec l'une de ses professeures qui le soutiendra jusqu'au bout. La confusion de la relation qu'entretiennent la mère et le fils troublera le spectateur du début à la fin du film.

Xavier Dolan est un jeune canadien qui a fait ses débuts lors de spots publicitaires à l'âge de six ans, puis a continué en tant que comédien à la télévision et au cinéma. Ce film est son premier long métrage. Il l'a financé par ses propres moyens et a engagé lui-même les acteurs, se dévouant pour le rôle principal. Le parcours de ce scénariste-metteur en scène-acteur semble bien débuter, le succès lors de la projection à la Quinzaine des Réalisateurs ayant été imminent, et le film ayant obtenu un Prix amplement mérité. Âgé de 20 ans, il semble donc promis à une belle carrière.

Malgré son peu d'expérience, l'auteur fait preuve d'un professionnalisme qui règne tout au long du film. À tous les niveaux, J'ai tué ma mère se présente comme une réussite. Le scénario est d'une simplicité qui le rend complexe. On peut bien voir l'amour que se portent mutuellement Hubert et sa mère, malgré les nombreux conflits qui nuisent à cette relation de filiation que n'assume plus le jeune homme. On ressent une large détresse en observant que le fils accuse plusieurs fois sa mère d'avoir la maladie d'Alzheimer. On peut alors supposer que la complicité disparue entre les deux personnages est due à un profond manque de confiance, comme par exemple le fait que Hubert n'ait rien avoué à sa mère sur son homosexualité. Cette tristesse qu'il éprouve à dire qu'il "hait" Chantal le ronge toujours plus. Les seules fois où l'on voit le jeune homme esquisser un large sourire sont celles où il se trouve en compagnie de ses amis ou de sa professeure à qui il va demander de l'aide et avec qui une grande complicité va voir le jour. On le surprend également lorsqu'il demande à sa mère de vivre seul en appartement ou après sa prise de drogues. On note par ailleurs le contraste entre la mère de Hubert et celle d'Antonin, qui a refait sa vie, s'habille de façon moderne, accepte l'homosexualité de son fils, et demande aux deux adolescents de décorer son bureau. Hubert rêve de l'avoir pour génitrice, alors que Chantal, vit seule dans un appartement kitsch, lui semble plus ringarde et n'est pas au courant qu'il fréquente un garçon.

Les plans de caméra de ce film situé à notre époque sont très intéressants : lors de discussions entre Hubert et sa mère, on peut voir que lorsque l'un des deux parle, la caméra est fixée sur lui et ne filme pas l'autre personnage, ce qui montre bel et bien une séparation stricte entre eux. À plusieurs reprises, Hubert est montré en gros plan à l'écran, en noir et blanc : dans ces scènes, il décrit ses états d'âme qu'il garde pour lui seul ; mais lorsque sa mère décrit l'existence de ce "journal intime vidéo", on nous montre alors avec quoi et où Hubert se filme en parlant.

Le son est aussi un élément très important de ce long métrage, à travers la musique. Tantôt calme, tantôt plus vive, la partition crée une sensation irrésistible de se laisser bercer. Quand Hubert et Eric, son ami du pensionnat, ont une expérience illicite, la musique est lente et transporte les spectateurs. Vers la fin du film, on retrouve un magnifique morceau : on avance avec Hubert que l'on voit de dos ; ses pas (que l'on n'entend pas mais que l'on perçoit à ses mouvements d'épaules) semblent diriger la musique, tel un chef d'orchestre.

Regrettons toutefois l'absence de sous-titres, le parlé québequois des personnages (débit rapide, certains mots différents de notre langue), ne permettant pas au spectateur français de décrypter tous les mots prononcés.

J'ai tué ma mère n'en reste pas moins un film riche en émotions, positives ou non. Ce long métrage est un véritable régal pour les spectateurs qui ne manqueront pas de rire pendant la projection, y compris lors des différends ente Hubert et sa mère.

Juliette Couzi, Lycée Stanislas de Cannes


1h40 - Canada - Scénario : Xavier DOLAN - Interprétation : Xavier DOLAN, Anne DORVAL, Suzanne CLEMENT, François ARNAUD, Patricia TULASNE.

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