Serbis (Service)
de Brillante Mendoza
Sélection officielle
palme

Sortie en salle : 12 novembre 2008




Après le coup d'éclat de Foster Child / John John (Quinzaine des Réalisateurs 2007), certains ont fait la fine bouche devant ce Serbis moins politiquement correct et sans doute plus inabouti formellement.
On a reproché à l'auteur un récit excessivement glauque, un style amateuriste, une imagerie criarde et une bande-son assourdissante, les bruits de rue (klaxons, circulation) dégageant un volume de décibels particulièrement éprouvant.
Certes, l'histoire n'est pas de tout repos en dépit d'une absence de linéarité narrative. Dans le centre d'Angeles, aux Philippines, une famille commerçante recomposée tient un vieux cinéma qui projette des films érotiques et pornographiques des années 70. Les vacations quotidiennes des personnages révèlent leurs rituels, penchants, et préoccupations : ainsi, la grand-mère intente un procès pour bigamie au mari qui l'a plaqué ; la jeune ouvreuse, enceinte d'un des fils, projectionniste, est sommée de révéler la vérité à sa famille.


Comme dans John John, la caméra suit presque tous les protagonistes, l'unité de temps renforçant ici un aspect quasi documentaire. Les entrées et sorties des clients, ainsi que le commerce sexuel auquel ils se livrent, n'est pas sans évoquer La Chatte à deux têtes de Jacques Nolot (voir article de Marie-Jo Astic dans CinémaS 2002). C'est en fait le mélange de sérénité familiale (matriarcale de surcroît) et de déviances chroniques qui crée un choc certain, amplifié par l'unité de lieu du cinéma. Ainsi, les déambulations du petit garçon espiègle font écho à la présence de la fillette dans la maison close de Belle de Jour de Buñuel. D'autres digressions insolites tempèrent un faux naturalisme : ce sont les images d'une (vraie) chèvre devant l'écran, suscitant un mouvement de panique dans la salle, ou celles d'un furoncle, symbole du caractère imprévisible du quotidien.
Film d'atmosphère audacieux mais efficace (ses 90 minutes défilent vite), Serbis aurait mérité, au même titre que Import/Export l'an dernier, un prix « très spécial », si cette récompense au premier degré avait existé à Cannes.

Gérard Crespo

 


1h30 - Philippines / France - Scénario et dialogues : Armando LAO - Photo : Odyssey FLORES - Décors : Carlo TABIJE, Benjamin PADERO - Musique : Gian GIANAN - Montage : Claire VILLAREAL - Son : Emmanuel NOLET CLEMENTE - Interprétation : Dan ALVARO, Mercedes CABRAL, Julio DIAZ, Jaclyn JOSE, Kristofer KING, Coco MARTIN, Gina PAREÑO.

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