Hamaca paraguaya
Paz Encina
Sélection officielle
Un certain regard
Prix de la Fipresci

très content


« Il n'y a plus rien à faire »

Un plan large campe, pour toute la durée du film, le décor constitué d'un hamac tendu entre deux arbres d'une forêt, sur lequel vient s'asseoir et parler un couple déjà vieux.
Nous sommes en 1935, au fin fond du Paraguay, et Ramon et Candida polémiquent en patois local : sur la chienne qui ne cesse d'aboyer, sur la chaleur, sur la pluie qui aurait dû arriver, sur le vent qui ne se lève pas, sur le comportement des oiseaux par rapport au temps, sur leur fils parti pour une guerre inutile de plus contre la Bolivie. L'un espère, l'autre désespère, à moins que ce ne soit l'inverse.
Réalisé exclusivement en plans fixes, Hamaca paraguaya est construit sur le modèle d'une tragédie (unités de temps, de lieu, d'action) en un acte, entrecoupé de récits illustrés d'images d'une surprenante beauté (les hommes au champs, les femmes au lavoir) : Ramon travaillant sa canne à sucre sur fond de dernière conversation entre les deux hommes, Candida lavant son linge à la fontaine et adieux réciproques de la mère et du fils, Ramon assis devant sa maison apprenant de Don Jacinto que cette guerre est finie depuis deux jours, Candida aux fourneaux rejetant la lettre que le facteur lui apporte.

Le plus remarquable dans ce premier film de Paz Encina est que cette absence totale de rythme, ces plans désespérément immuables, cette simplicité mise à nue, ces mêmes paroles indéfiniment ressassées, permettent d'exprimer aussi profondément tant de tendresse, de tristesse, d'intense fatigue et de profonde détresse chez deux êtres.
L'absence a fait place à l'attente et Ramon et Candida n'ont à présent plus rien à faire, ils n'ont même plus à se disputer. Il ne leur reste plus que leur complicité pour affronter leur peur de la mort. Le tonnerre gronde, il va sans doute pleuvoir, mais rien n'a désormais plus d'importance.

Marie-Jo Astic


1h18 - Paraguay - Photo : Behnisch Willi - Décors : Carlo Spatuzza - Musique : Oscar Cardozo Ocampo - Montage : Miguel Schverdfinger - Son : Guido Berenblum, Victor Tendler - Interprétation : Georgina Genes, Ramon del Rio.

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