Conte
divers
Fleur est parisienne, taciturne et peu causante. Elle profite
pour les vacances de la maison de son oncle, surplombant Marseille.
Vénus
est russe, enjouée et n'a pas la langue dans sa poche. D'ailleurs,
elle n'a pas grand chose dans ses poches, ayant largué ses derniers
euros en même temps que son dernier amant. Fleur héberge Venus et les
voilà,
toutes deux, en quête du garçon idéal, de l'amour absolu. Après une
rencontre avec un premier prétendant un peu lourd prénommé Dieu,
ce sera sur Bonheur que les espoirs des jeunes filles vont se porter…
Emmanuel Mouret (Promène-toi donc tout nu ! et Laissons
Lucie faire !) ne doit pas cacher son admiration pour Eric Rohmer
dont l'influence est ici manifeste. On va trouver chez Venus
et Fleur toutes les qualités d'un cinéma frais et délicat, frisant
l'artifice pour mieux cerner le naturel.
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Mais
pour atteindre le plaisir éprouvé devant
les Contes des quatre saisons par exemple, il aurait fallu
donner à ces deux actrices formidables (Veroushka Knoge et Isabelle
Pires) et incarnant (au sens premier du terme) parfaitement les deux
facettes d'une même adolescence en mutation vers l'âge adulte, des
scènes plus dialoguées qu'un manque de scénario écrit rend faussement
littéraires.
La dualité entre
Venus et Fleur étant le noyau de chaque scène du film, on aurait souhaité des échanges
verbaux plus travaillés pour servir davantage l'équivoque. Il n'en reste pas
moins que le petit budget (sans doute responsable d'un travail en amont non écrit)
donne au troisième film d'Emmanuel Mouret toute sa fraîcheur et sa fluidité,
passant d'une gravité cocasse à une amertume légère. La caméra cadre de manière
juste et sensible les personnages, notamment dans la fameuse scène où Bonheur
(Julien Imbert) avoue à Fleur sur la plage : « J'ai l'impression de voir mon
futur incarné devant moi ».
Jean Gouny
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