Shara Naomi Kawase Sélection Officielle |
Etrange
et beau, le film de Naomi Kawase est avant tout un hommage au cinéma, à
son pouvoir de changer le regard des hommes, à s'approprier le temps et
l'espace pour lui conférer une dimension nouvelle. Essentiellement tourné en caméra portée, Shara peint dans ses moindres replis l'univers de gens simples, les dépasse pour mieux absorber le drame qui les tétanise. Dans les dédales des rues du vieux quartier historique de Nara, ancienne capitale du Japon, deux garçons, Kei et Shu Aso, frères jumeaux, se poursuivent : la caméra les suit, s'écarte, revient et perd Kei. L'enfant est hors champ, il ne reviendra plus, plongeant les survivants, sa famille, ses proches, dans l'absence. Et c'est encore la caméra qui, par ses mouvements, ses plans apparemment anodins, vient accompagner le travail de deuil et lentement désamorcer une peine infinie. Elle leur a ôté une vie, elle leur en donnera une autre. |
Le traitement
des événements et non-événements est particulièrement surprenant : la
course effrénée, en long travelling, de Shu, qui craint d'arriver trop
tard pour assister à la naissance d'un nouveau petit frère et qui trouve
sa mère tranquillement occupée au jardin, la conversation presque anodine
ou Yu, adolescente amie de la famille Aso, apprend les origines de sa
naissance, la bouleversante danse, inondée d'un torrent de pluie, lors
de la célébration de la fête de Basara. Scène magnifique, presque violente,
grâce à laquelle tout est finalement dit : le deuil s'est accompli, un
nouvel être va voir le jour, tous sont là pour continuer d'accompagner
sereinement la marche du monde. |
1h39 - Japon - Scénario et dialogues : Kavase Naomi - Images : Sato Yuzuru - Montage : Anraku Shôtaro, Sanjô Tomoo - Interprétation : Fukunaga Kahei, Hyoundo Yaka, Kawase Naomi, Nalase Katsuhisa, Higuchi Kanato. |