Pas de repos pour les braves
No Rest for the Braves
Alain Guiraudie
Quinzaine des Réalisateurs
content


Devant certains films largement maîtrisés mais par trop tricheurs qui ont parsemé les sélections du Festival 2003, on a bien envie de défendre un film imparfait, mais honnête et ludique.
Après ses deux moyens métrages Du soleil pour les gueux (55 minutes) et Ce vieux rêve qui bouge (50 minutes), le réalisateur aveyronnais Alain Guéraudie nous propose un « sud-ouestern » métaphysique, aussi foutraque qu'étrange.
Pas question ici de courir le risque d'un moindre résumé de l'intrigue. Même les personnages principaux (Igor le philosophe, effrayé par l'avant-dernier songe qui annoncerait sa mort ; Johnny Got, « petit fouille-merde de village » comme le définit Guéraudie et le juvénile et tourmenté Basile) se plaisent à nous perdre dans un jeu de saute-mouton onirique, allant jusqu'à changer de noms entre les épisodes composites d'une course-poursuite existentielle, lardée d'un trafic très stupéfiant de petites boules rouges…

Une vingtaine de lieux (le “village qui meurt“ et le “village qui rit“ sont les carrefours pour Glasgaud, Bairoute, Buénauzères ou Riaux- de-Janerrot !) et trente-cinq comédiens participent à cette farce surréaliste pas toujours assumée dans laquelle se côtoient le meilleur comme le pire.
Certes tout n'est pas défendable sous le prétexte de sincérité, et on est aussi irrité par les dérives de mise en scène qu'emballé par certains dialogues, très écrits, juste et souvent venimeux (c'est normal pour du cinéma dard et déchets).
Mais le moins que l'on puisse dire est que Pas de repos pour les braves ne répond à aucun formatage du cinéma actuel. Dans les premiers moments du film, alors qu'on ne sait pas encore où on a mis les yeux (le saura-t-on jamais ?), Igor, après un long plan fixe le montrant passant et repassant devant une fenêtre ouverte sur une nuit chaude et pesante, déclare : « Comment c'est possible de s'emmerder à ce point ? » … comme si Guiraudie savait notre souffrance passée sur les films de la journée et nous promettait un décollage imaginatif.

Jean Gouny


1h47 - France - Scénario : Alain Guiraudie - Image : Antoine Heberlé - Son : Sylvain Girardeau - Musique : Teppaz & Naz Orchestra - Montage : Pierre Molin - Interprétation : Thomas Suire, Laurent Soffiati, Thomas Blanchar.

ACCUEIL

RETOUR A LA LISTE DES FILMS