A cinq heures de l'après-midi
At Five in the Afternoon - Panj é asr
Samira Makhmalbaf
Sélection Officielle
Prix du jury

A cinq heures de l'après-midi confirme la délicatesse de Samira Makhmalbaf dont l'humanisme et le métier ont été justement récompensés par le jury de Patrice Chéreau. Comme La Pomme (1999), qui la révéla au public français, cette œuvre brosse un portrait de la condition féminine dans le monde arabe. Noqreh est une jeune femme afghane vivant avec son père (un patriarche pieux) et sa belle-sœur (veuve et mère d'un enfant malade). Fuyant Kaboul meurtri par la dictature des Talibans et la guerre éclair américaine, les trois personnages seront contraints de traverser un pays en ruines et à l'abandon. Les meilleures séquences se déroulent pendant la première moitié du film : chaussée de talons, Noqreh se rend en cachette de son père dans une école et revendique son ambition de devenir la première présidente de la nouvelle république afghane.

Les discussions dans la classe donnent lieu à des dialogues d'une rare finesse et les quelques instants de comédie (le marivaudage avec un soupirant poète qui veut devenir son directeur de campagne) montrent que la cinéaste maîtrise les ruptures de ton. Le film culmine avec les déambulations de l'héroïne dans un palais détruit : des instants de grâce et de contemplation, qui feront oublier de gratuites envolées esthétisantes (des gros plans majestueux sur des ombrelles). Techniquement plus abouti que Le Tableau noir (déjà prix du jury il y a trois ans), A cing heures de l'après-midi est donc une réussite : renvoyant dos à dos l'obscurantisme religieux et la domination occidentale, il porte une lueur d'espoir dans l'avancée de la démocratie et de l'égalité.

Gérard Crespo