Dix, comme dix séquences de la vie de six femmes iraniennes, cinq passagères d'une même voiture et la conductrice qui sillonne inlassablement les rues de Téhéran. Six femmes qui ont un immense besoin de parler, d'être écoutées. La voiture, on y est embarqué. Et les voilà qui nous parlent de leurs ennuis, de leurs émois, de leurs malheurs, au milieu des embouteillages et au rythme des coups de klaxon. Quoi qu'il en paraisse, ce film n'est pas qu'un (très beau) reportage sur la surprenante liberté de parole des femmes en Iran. Abbas Kiarostami ne s'en cache pas : il pourrait s'agir de dix séquences de la vie de la même femme

Toujours roulant dans la divan-mobile, on est exalté par ces visages, leurs éclats de voix, leurs larmes parfois, sans jamais apercevoir l'extérieur qui défile. « Tu dois d'abord t'aimer toi-même ! » répète la conductrice à ses patientes. Les actrices, non-professionnelles, sont troublantes de sincérité et de pudeur ; de plus, le réalisateur – c'est là son art – a su nous impliquer dans ce jeu où l'on est juge et partie. Un grand plaisir émerge du point de vue adopté… Le montage est à coup sûr la clef de voûte de cette belle réussite.

Nicolas Fine