Irréversible
Gaspar Noé
Sélection Officielle
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Même pas peur, et même pas choquée, ma sensibilité. Désolée. Seul contre tous, présenté à la Semaine de la Critique en 1998, avait laissé présager autre chose. C'est au milieu du film qu'un carton, dissuasif et provocateur, enjoignait au public de quitter la salle : là le carton était déjà édité à la mi-avril et l'événement du Festival est devenu un non-événement. L'homme campait un personnage suffisamment envoûtant, même si on était à mille lieues de son univers glauque et oppressant. L'homme (Philippe Nahon), on le retrouve justement au début du mlif, donc à la fin : première bonne raison pour le commencer à l'envers. La seconde étant, à défaut de contenu, de lui donner un contenant.
Scénario : un mec se venge d'un autre mec qui a violé et copieusement esquinté son ex-petite amie ; son meilleur copain, qui vient de lui piquer ladite petite amie, lui apporte son soutien inconditionnel dans la traque pour faire payer le coupable. Au cours des dix saynètes, montées de dix à zéro, certaines auraient pu nous attacher — évidemment a posteriori, mais bon, c'est toujours ça… — aux personnages qui jusqu'ici nous ont laissés dans une totale indifférence, quoi qu'il leur arrive. Eh non ! Ils sont irréversiblement inintéressants… et fort malhonnêtement filmés.

Car la caméra, au lieu d'une montée d'intensité, opère, pour cause de verlan, une descente : illustrant la grosse colère des deux potes, elle filme dans le plus grand désordre force plancher et plafond dans la très crasseuse boîte de nuit pour gays, le Rectum (!), où se passe la scène de la vengeance : de quoi vous empêcher de bien localiser les épanchements de cervelle sortie d'un crâne fracassé par un extincteur grand modèle. Elle finit — la arémac — par se stabiliser lors de la fameuse et interminable scène de viol : une belle et aguichante jeune femme (genre Monica Bellucci) s'avise de rentrer chez elle à une heure avancée de la nuit pas un souterrain d'un quartier pas terrible d'une grande ville dans une robe que l'on oserait même pas qualifier de vêtement… et que croyez-vous qu'il advienne ? Ah ! décidément… l'insécurité…
Déjà au générique, Gaspard assène son nom en un grand coup de tambour : Noé. Comme on dirait Truffaut ou Fellini. Prétention insupportable et fausse alerte : un tel film n'est pas apte à faire perdre son prénom à un réalisateur.

Marie-Jo Astic


1h35 - France - Scénario et dialogues : Gaspar Noé - Images : Gaspar Noé, Benoît Debie - Musique : Thomas Bangalter - Montage : Gaspar Noé - Décors : Alain Juteau - Interprètes : Monica Bellucci (Alex), Vincent Cassel (Marcus), Albert Dupontel (Pierre), Philippe Nahon (Philippe), Jo Prestia (Le Ténia).

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