Arctic
de Joe Penna
Sélection officielle
Hors compétition
Séance de minuit







Seul au monde polaire

En Arctique, la température peut descendre jusqu’à moins –70°C. Dans ce désert hostile, glacial et loin de tout, un homme lutte pour sa survie. Autour de lui, l’immensité blanche, et une carcasse d’avion dans laquelle il s’est réfugié, signe d’un accident déjà lointain. Avec le temps, l’homme a appris à combattre le froid et les tempêtes, à se méfier des ours polaires, à chasser pour se nourrir. Un événement inattendu va l’obliger à partir pour une longue et périlleuse expédition pour la survie car cette terre gelée ne pardonne aucune erreur… Joe Penna s’était fait connaître sur YouTube avec une chaîne consacrée à la musique expérimentale et aux courts métrages. Il a par ailleurs tourné des films publicitaires (Coca Cola, Disney…). Pour son premier passage au long métrage, il a pu disposer d’un budget confortable et du concours de Madds Mikkelsen, acteur bankable et comédien réputé pour ses prises de risques autant que son jeu puissant. L’œuvre s’apparente au survival en territoire éloigné et désert qui a connu d’illustres précédents comme Seul au monde de Robert Zemeckis ou Seul sur Mars de Ridley Scott. Le premier intérêt du film de Penna qui a coécrit le scénario est de nous donner aucun indice sur les raisons de la présence d’Overgård dans cette région reculée du globe : le spectateur en quête de narration explicative ne trouvera ni flashback sur sa vie passée, ni photos de famille, ni monologue en voix off précisant les circonstances de la panne d’avion dont il a été victime. Du coup, la moindre de ses expressions faciales ou ses choix pour survivre au sein d’une nature sauvage et immense permettent de cerner ses traits de personnalité. Arctic joue ainsi la carte du film contemplatif, peu habituel dans ce genre de production, les activités d’Overgård étant presque filmées à la manière d’un documentaire sur les kits de survie en milieu arctique.

Joe Penna est par ailleurs habile dans sa manière d’utiliser les temps forts qui viennent contrecarrer les efforts de son personnage : l’attaque d’un ours ne donne lieu à aucune surenchère, et même dans les moments les plus difficiles, aucun pathos ni surlignage musical ne viennent faire glisser le film sur la pente de la sensiblerie. L’arrivée rapide d’un second personnage qui tiendra le rôle de « Vendredi » dans l’existence solitaire de notre homme pourra paraître comme une convention de scénariste mais insuffle au film un réel rythme : la tension qui en résulte contraste avec le ton d’exercice de style brillant mais un peu vain qui se dégage des premières minutes du film. L’équipe technique et artistique qui a entouré Joe Penna n’est pas pour rien dans les qualités visuelles du produit final, et s’est tirée avec honneur de conditions de tournage difficiles (pluies glaciales, tempêtes de neige, routes fermées). Le chef opérateur Tómas Örn Tómasson a ainsi signé une photo élaborée mais évitant la joliesse des plans d’espaces enneigés. Il faut aussi souligner le travail du musicien Joseph Trapanese (la série des The Raid) qui a composé une partition élégante évitant tout débordement lyrique. Et les fans de Madds Mikkelsen seront ravis de retrouver un acteur élargissant son registre après ses prestations remarquables dans La Chasse de Thomas Vinterberg ou The Salvation de Kristian Levring. Au final, ce survival est plus que recommandable même s’il ne révolutionne pas le genre.

Gérard Crespo



 

 


1h50 - Islande - Scénario : Joe PENNA, Ryan MORRISON - Interprétation : Mads MIKKELSEN, Maria Thelma SMARADOTTIR.

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