Fortunata
de Sergio Castellito
Sélection officielle
Un Certain Regard
Prix d'interprétation féminine






Madre Coraggio

Il s'agit du septième long métrage en tant que réalisateur de Sergio Castellitto. Le comédien, que l'on a pu admirer notamment dans Le Sourire de ma mère de Marco Bellochio, a choisi de brosser avec ce film le portrait d'une femme du peuple. On y suit le parcours de Fortunata, une coiffeuse à domicile qui vit seule avec sa fillette atteinte de troubles comportementaux. Souhaitant ouvrir un commerce, elle cherche à réunir les fonds nécessaires. Elle doit surtout se battre avec son ancien époux, violent et menaçant, et ne trouve le réconfort qu'auprès de ses voisins. Parmi eux se trouve un tatoueur toxicomane qui vit avec sa mère, une ancienne comédienne qui sombre dans la folie. Au centre médical où elle accompagne sa fille chaque semaine, Fortunata fait la connaissance de Patrizio, un psychothérapeute bienveillant qui lui fait une cour assidue... Fortunata se réfère en premier lieu au néoréalisme italien incarné naguère par Rossellini ou De Sica, prolongé ensuite par Comencini ou Germi, puis revisité par une nouvelle génération de cinéastes dont Tizza Covi et Claudio Giovannesi. À cet égard, la Mère Courage de Castellito pourrait être la digne héritière des personnages campés par Anna Magnani dans Bellissima ou Mamma Roma, Sophia Loren dans La Ciociara, Claudia Cardinale dans La Storia ou Patrizia Gerardi dans La Pivellina.

En même temps, le Loach de Ladybird n'est pas loin : Castellitto partage avec le cinéaste anglais le sens aigu de l'observation des laissés-pour-compte de la société, dans le cadre d'une mise en scène classique allant à l'essentiel. Mais le petit monde qui gravite autour de Fortunata pourra sembler stéréotypé et manquant de nuances. Le scénario est prévisible, et les péripéties trop téléphonées pour captiver : les coups bas de l'ex, l'accident de la petite fille, ou le secret dévoilé sur la plage dans la dernière partie ne sont que des artifices de narration. Et Castellito gâche un beau sujet par quelques maniérismes visuels peu opportuns. Sa direction d'acteurs est par contre impeccable. Stefano Accorsi apporte avec élégance la touche romanesque qui est la sienne depuis Juste un baiser de Gabriele Muccino, quand Hanna Schygulla évoque avec émotion un monde disparu. Dans le rôle titre, Jasmine Trinca offre une prestation remarquable, après celles de la sœur endeuillée dans La Chambre du fils et de la jeune femme internée dans Nos meilleures années.

Gérard Crespo


1h43 - Italie - Scénario : Sergio CASTELLITO, Margaret MAZZANTINI - Interprétation : Jasmine TRINCA, Stefano ACCORSI, Alessandro BORGHI, Edoardo PESCE, Hanna SCHYGULLA.

ACCUEIL

RETOUR A LA LISTE DES FILMS