Les Violons du bal
de Michel Drach
Sélection officielle
Cannes Classics








Le passé recomposé

Réalisateur ayant oscillé entre le cinéma d'auteur (Elise ou la vraie vie, 1970) et une démarche plus commerciale, Michel Drach concilia ces deux tendances avec ce film autobiographique. Présenté en compétition officielle au Festival de Cannes 1974, Les Violons du bal fut primé par le biais de son interprète, Marie-José Nat, par ailleurs épouse du cinéaste. C'est que Les Violons du bal est un film de famille. Michel Drach a d'abord voulu raconter son enfance douloureuse pendant l'Occupation.

Tout avait commencé lorsque, dans la cour de récréation, un petit camarade d'école lui demande s'il est juif. Le garçonnet n'en sait rien et se confie à sa mère et sa grand-mère (Gabrielle Doulcet), qui lui confirment l'évidence. La série de galères qui s'abat ensuite sur les siens révèle la nécessité de se cacher puis de fuir en Suisse. En parallèle à ce récit (en couleurs) se déroule une période contemporaine (filmée en noir en blanc), dans laquelle Michel Drach joue son propre rôle et tente de convaincre les producteurs de financer son film. Cette mise en abyme est accentuée avec le casting, puisque Marie-José Nat incarne elle aussi... elle-même, avant d'interpréter la mère de Michel... Quand à ce dernier, il est joué pour les scènes du passé par leur propre fils, David.

Les Violons du bal ne manque ni de sincérité, ni d'intensité dramatique, ni d'efficacité.

Le savoir-faire du réalisateur se ressent en particulier dans les séquences finales, qui montrent la famille tenter de franchir la frontière en compagnie d'un passeur (Paul Le Person) plus ou moins bienveillant. Autrement, l'œuvre présente une facture un peu trop télévisuelle, et il n'est pas surprenant que le film ait été coproduit par l'ORTF, tant il correspond aux canons de ce que l'on ne nommait pas encore le prime time. Sans doute conscient des limites d'un scénario émouvant mais convenu, Michel Drach a greffé la partie où il se filme adulte, et qui recèle des maladresses, notamment lorsque le réalisateur (par la suite incarné par Jean-Louis Trintignant) vient en aide à un étudiant contestataire en fuite (Christian Rist), lequel ressemble comme deux gouttes d'eau au grand frère de sa jeunesse. On aura compris que cette volonté d'établir une distance par un « film dans le film » n'apporte pas grand chose, Michel Drach n'étant pas Fellini...

Il faut par ailleurs souligner qu'avec la même trame, le cinéma nous a proposé des films bien plus aboutis sur cette période noire de l'Histoire, de Lacombe Lucien et Au revoir les enfants, de Louis Malle, au Pianiste de Polanski, en passant par Le Dernier métro de Truffaut. En dépit de ces réserves, Les Violons du bal est un film attachant. Il vient de bénéficier d'une restauration effectuée par le laboratoire Silberway Media.

Gérard Crespo



 

 


1974 - 1h44 - France - Scénario : Michel DRACH - Interprétation : Marie-José NAT, Jean-Louis TRINTIGNANT, Gabrielle DOULCET, Nathalie ROUSSEL, Christian RIST, Yves AFONSO, David DRACH, Luce FABIOLE, Guy SAINT-JEAN, François LECCIA, Guido ALBERTI, Hella PETRI.

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