Gente de Bien
de Franco Lolli
Semaine de la Critique



Sortie en salle : 18 mars 2015






« Soutien du faible, secours du malheureux, consolation de l'affligé. »

Bogota, aujourd’hui. Éric, dix ans, se retrouve du jour au lendemain avec Ariel, son père qu'il connaît à peine. L'homme a du mal à construire une relation avec son fils et à se maintenir à flot. Maria Isabel, la femme pour laquelle Ariel travaille en tant que menuisier, décide de l'aider et prend l'enfant sous son aile. Sans prendre la mesure des conséquences de ses actes.

Des 400 coups à Enfance clandestine en passant par les films de Ken Loach ou Luigi Comencini, le cinéma s’est souvent approprié avec bonheur le thème de L’enfance nue, pour reprendre le titre du beau premier film de Maurice Pialat. Gente de Bien marque également les débuts au long métrage de Franco Lolli, formé à la Fémis, et certainement nourri de ces références. Il réussit pourtant à trouver le ton personnel, sans excès de pathos ou complaisance envers des situations glauques. Les premières et dernières séquences ont une belle teneur néoréaliste, le cinéaste filmant, à la manière d’un documentaire, les errances d’Eric dans les rues de Bogota, d’abord avec sa mère, puis avec ce père qu’il découvre et avec lequel il ne se sent pas à l’aise.

Le son direct, la sobriété des cadrages et des prises de vue ne sont pas sans évoquer l’approche d’un Brillante Mendoza, sentiment qui s’amenuise avec l’arrivée du personnage de Maria Isabel, qui fait glisser l’œuvre vers le drame psychologique et la critique sociale. C’était déjà le cas de son court métrage Como todo el mundo, grand prix au Festival de Clermont-Ferrand en 2008, et qui narrait les déboires d’une mère et son fils « surclassés » chez les riches de Bogota. Bourgeoise intellectuelle et humaniste, Maria Isabel (admirable Alejandra Borrero) adopte un comportement bienveillant qui n’est pas sans évoquer l’attitude de Macha Méril envers Sandrine Bonnaire dans Sans toit ni loi. Mais transporté dans une très provisoire nouvelle famille d’accueil, le temps des vacances de Noël, Eric fait l’initiation des rapports de classe par l’ostracisme humiliant dont il est victime de la part des autres garçons de son âge, et relayé par l’attitude gênée de leurs parents. Portant un regard sans concessions sur les hypocrisies caritatives des « gens de bien », Franco Lolli donne alors la plénitude de son talent, misant sur la pudeur et la sobriété pour faire partager sa vision désenchantée des solidarités. Initialement présenté à la Semaine de la Critique, Gente de Bien a obtenu plusieurs prix dans des festivals internationaux dont Londres, La Havane et San Sebastian.

Gérard Crespo


 

 


1h26 - Colombie - Scénario : Franco LOLLI, Catherine PAILLÉ - Interprétation : Brayan SANTAMARIA, Carlos Fernando PEREZ, Alejandra BORREJO.

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