Le Médecin de famille
Wakolda
de Lucia Puenzo
Sélection officielle
Un certain regard



Sortie en salle : 6 novembre 2013




J’aime les belles choses

Après XXY, présenté à la Quinzaine des réalisateurs en 2007, puis El Niño Pez, Wakolda est le troisième film de Lucía Puenzo, qui adapte son propre roman éponyme. Elle continue ainsi son introspection au cœur des identités et de la conscience politique. Avec Wakolda, elle fait se rencontrer la grande Histoire, sous son aspect le plus sombre, et l’itinéraire d’une famille argentine.

Nous sommes en Patagonie, en 1960. Eva, Enzo et leurs trois enfants prennent la route pour Bariloche, où les parents doivent ouvrir une chambre d’hôtes. Lorsque le docteur Rolf, vétérinaire, leur demande l’autorisation de faire route ensemble, on sent déjà que cela n’est pas uniquement par appréhension de l’orage qui menace. Les trombes d’eau balayant les immensités patagoniennes offrent une très belle scène qui installe un climat de menace et de violence.

Voici un moment déjà que le bon docteur est attiré par Lilith, l’une des trois enfants, et qu’il lui parle de perfection, un discours qui semble également séduire la petite. Lilith a 12 ans, mais n’en paraît que 9.

À Bariloche, au bord du lac Nahuel Huapi, au pied des glaciers, où est installée une importante communauté nazie, Eva décide d’inscrire les enfants à l’école allemande. Les garçons y appellent Lilith « le microbe », les filles « la naine ». Des rumeurs courent : après Eichman, des agents israéliens sont à la recherche de Mengele, l’ange de la mort du camp d’Auschwitz. Nora, photographe est également sur ses traces. Encore couvert par sa fausse identité, Helmut Rolf, tout à son idéologie paranoïaque étayée par ses croquis, calculs et mesures d’étude des races, va « opérer » sur plusieurs fronts : forcer Lilith à grandir, alors que son âge osseux indique que rien ne presse ; convaincre Enzo, artisan d’un atelier de poupées, de se lancer dans un programme de fabrication de masse ; se pencher sur le cas d’Eva, enceinte de jumeaux…

SS in Uruguay… SS in Paraguay… à l’instar de ces pays et de tant d’autres, comment l’Argentine a-t-elle pu accueillir et protéger (Mengele a continué de sévir ici et ailleurs pendant près de vingt ans encore après cette époque) de tels bourreaux ? À sa souffrance et sa détresse face à la violence de cette question, particulièrement en tant que citoyenne argentine, la réalisatrice s’interdit toute démonstration pesante et touche sa cible en privilégiant la sensibilité et l’impressionnabilité des personnages. La direction d’acteur est d’ailleurs irréprochable. La caméra s’adapte tour à tour à l’amplitude du propos et à l’intimité des huis-clos.

À noter que la présentation du film a pris place quatre jours seulement après la mort du dictateur argentin Jorge Videla.

Marie-Jo Astic

 

 

 


1h30 - Argentine - Scénario : Lucia PUENZO - Interprétation : Natalia OREIRO, Alex BRENDEMUHL, Diego PERETTI.

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