Grand Central
de Rebecca Zlotowski
Sélection officielle
Un certain regard

Prix François Chalais


Sortie en salle : 28 août 2013




Ça fait quoi la dose ?

Ça finit par faire cracher du sang. Bienvenue en terres inconnues. Celle des centrales nucléaires, certes, mais surtout de ces zones satellites où font escale ces routards, intermittents de l’uranium, débarquant à Cuas ou Tricastin, regroupés et sommairement hébergés en mobile-home et recrutés temporairement pour des missions de sous-traitance, bien évidemment sous-payées, même si l’on exclut le facteur risque.

En direct avec les produits toxiques et les matériaux dangereux, toujours à la merci d’une défaillance de leur protection ou de la plus petite maladresse, le jeu de la roulette russe est leur quotidien. Chaque fin de journée, le détecteur affiche vert ou rouge. On compte aussi le nombre de tons de chaque alarme, qui indique le degré de gravité : du simple exercice d’alerte à l’accident fatal.

C’est ainsi que, tel un cowboy solitaire, Gary Manda rejoint la petite équipe de Gilles (Olivier Gourmet, tout en force et en bravade), qui lui apprend les gestes, les attitudes mais surtout, sans états d’âme, à la mort qui est en face. C’est aussi sur ce terreau propice aux passions fortes, qu’il tombe amoureux de Karole, voluptueuse, sensuelle femme de Toni. Blindée elle aussi. Tous sont bien au-delà des notions de courage ou de sacrifice, puisque celles-ci supposent un choix qu’ils n’ont pas.

C’est d’ailleurs curieusement plutôt à travers l’histoire d’amour que transparaît l’héroïsme, celui de croire encore un avenir possible malgré un quotidien trop hasardeux.

Ainsi Rebecca Zlotowski retrouve-t-elle celle qui est déjà son égérie, Léa Seydoux, toutes deux révélées à la Quinzaine des réalisateurs avec Belle épine en 2010 et décline à nouveau le thème de la prise de risque, de la vie à cent à l’heure, des états que provoquent les situations de mise en danger. Le film est fort et on n’en sort pas indemne.

Grand Central affiche une parenté cinématographique évidente avec la belle époque du réalisme poétique, mais aussi social et politique. La réalisatrice avoue avoir choisi pour son héros le nom de Manda, en lignée directe avec le personnage de Casque d’or. Mais c’est plus encore à La Bête humaine que l’on a envie de se référer. Et ce n’est pas le moindre des compliments.

Marie-Jo Astic

 

 

 


1h35 - France - Scénario : Rebecca ZLOTOWSKI, Gaëlle MACÉ - Interprétation : Léa SEYDOUX, Tahar RAHIM, Olivier GOURMET, Johan LIBÉREAU, Denis MÉNOCHET, Nozha KHOUADRA, Guillaume VERDIER.

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