Après le sud
de Jean-Jacques Jauffret
Quinzaine des réalisateurs
palme

Sortie en salle : 12 octobre 2011




« Chacun à ses raisons »

Ce premier film ne démérite pas, qui utilise un procédé pourtant déjà vu dans plusieurs œuvres depuis une dizaine d'années : un scénario mettant en scène plusieurs personnages qui se téléscopent, la même action étant filmée sous plusieurs angles au gré du point de vue du protagoniste : nous suivons ainsi Luigi, à peine sorti de l'adolescence, et qui travaille dans l'atelier de son père ; Georges, ancien délégué syndical à la retraite, qui effectue ses courses au supermarché local ; Amélie, la petite amie de Luigi, caissière dans le même centre commercial ; et Anne, la mère d'Amélie, qui s'absente pour subir une opération chirurgicale censée remédier à ses problèmes de boulimie. Jean-Jacques Jauffret, dont c'est le premier long métrage, excelle à montrer l'humiliation que peuvent subir des êtres fragiles dans une société impitoyable qui ne leur fera aucun cadeau : du désarroi d'Anne, qui craque en mangeant des pâtisseries orientales au moment crucial où elle doit être à jeun, nous passons à celui de Georges, dont la passion pour la musique classique s'avèrera fatale.


Aucune génération n'échappe à un certain mal-être traduisant l'individualisme ambiant. On notera l'utilisation habile des corps des protagonistes : à la nudité dérangeante d'une obèse répond la sensualité du corps de deux jeunes amants enlacés, dont l'érotisme est éradiqué par la séquence (magistrale) montrant un vieil homme aux prises avec des agents de sécurité. « Chacun à ses raisons », comme dirait Renoir, et Jauffret suit avec habileté une démarche de narration déjà balisée par Jackie Brown (Quentin Tarantino, 1997), Un couple épatant / Cavale / Après la vie (Lucas Belvaux, 2002), Elephant (Gus Van Sant, 2003), ou Rien de personnel (Mathias Gokalp, 2009) : sans atteindre ces sommets, le film vaut bien 2h37 (Murali K. Thalluri, 2006) ou Simon Werner a disparu... (Fabrice Gobert, 2010), qui adoptaient un projet identique. On notera un casting séduisant, dominé par le charisme de Adèle Haenel (L'apollonide, souvenirs de la maison close), Ulysse Grosjean et Sylvie Lachat.


Gérard Crespo


1h29 - France - Scénario : Jean-Jacques JAUFFRET - Interprétation : Adèle HAENEL, Sylvie LACHAT, Ulysse GROSJEAN.

ACCUEIL

RETOUR A LA LISTE DES FILMS