The Hawk is dying
Dressé pour vivre
Julian Goldberger
Quinzaine des réalisateurs

content

the hawk is dying

Le Faucon va mourir est tout sauf un film plaisant : un cinéma qui secoue et dérange les habitudes narratives du spectateur, en mettant en scène des personnages auxquels on ne pourra s’identifier directement, mais sans bousculer pour autant les codes du langage cinématographique.
Un garagiste entre deux âges vit avec sa sœur fantasque et son neveu autiste (Michael Pitt, méconnaissable et parfait), avec qui il partage la passion des oiseaux. Après des années de vaines tentatives, les deux hommes capturent la plus belle bête qu’ils n’aient jamais vu : un faucon à queue rouge. La présence de ce seul  animal évoque inévitablement le très beau Kes de Ken Loach (1969). Ici, la présence de l’oiseau est moins l’expression d’une quête identitaire qu’un dérivatif au manque de sens de la vie prétendue civilisée. Dans le rapport de l’homme à l’animal se crée une osmose envoûtante, entre fable, réalisme et fantastique, qui donne les meilleures séquences du film. Mais en aucun cas l’auteur ne cherche à lorgner vers la joliesse facile et la mièvrerie de Birdy ou du Grand bleu, nanars de référence.
L’œuvre est en outre composée de ruptures de ton dans la linéarité de son récit :


un suicide inattendu vient ainsi déplacer l’attention et donner au film une tonalité définitivement sombre. Le sommet de cette noirceur sera atteint par une saisissante scène dans un reposoir : ici la poésie noire nous atteind de plein fouet, en quelques secondes qui évoquent le frisson suscité par Les Yeux sans visage.
Mais sans doute les emprunts de Julian Goldberger, le jeune réalisateur, sont-ils à chercher dans le cinéma indépendant américain situé en marge des modes et dont John Sayles est l’un des représentants. Un cinéma de communautés et de solitaires qui par instants évoque aussi Cassavetes : les rapports frère/sœur font écho aux personnages de Love Streams et il n’est pas surprenant que comme dans ce film, nous les prenions au début pour des époux.
On pourra regretter une longueur excessive et des passages répétitifs, ainsi qu’un filmage somme toute anodin, mais ils ne gâchent que partiellement l’intérêt suscité. L’œuvre est aussi l’occasion de retrouver  Paul Giamati (American Splendor, Sideways), acteur solide aux choix courageux qui est un peu le nouveau Ben Gazzara du cinéma américain.

Gérard Crespo


1h46 – USA - Scénario : Julian Goldberger adapté de Le Faucon va mourir / The Hawk is Dying de Harry Crews - Image : Bobby Bukowski - Son : Franck Gaeta - Décors : Judy Becker - Montage : Affonso Gonçalves - Musique : Jonathan Goldberger - Interprètes : Paul Giamatti, Michelle Williams, Michael Pitt, Robert Wisdom, Rusty Schwimmer, Ann Wedgeworth.

ACCUEIL

RETOUR A LA LISTE DES FILMS