Peindre ou faire l'amour
To Paint or Make Love

Arnaud et Jean-Marie Larrieu
Sélection officielle
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William (Daniel Auteuil) et sa femme Madeleine (Sabine Azéma), vaguement embourgeoisés par trente ans d’une vie aux atours conformistes, s’installe dans une maison de campagne du Vercors. Leur fille est casée, ils ont l’argent nécessaire pour être à l’abri de frustrations matérielles.
Elle, fière d’une cinquantaine rayonnante mais pas forcément assumée, s’adonne à la peinture. Lui, en préretraite de Météo-France, ne saura pas prévoir les perturbations occasionnées par la rencontre avec Adam (Sergi Lopez) et Eva (Amira Casar).
D’emblée, l’amitié naissante avec le maire aveugle de la bourgade voisine et sa jeune et fraîche épouse apparaît bien différente des relations habituelles du couple, entre discussions politico-sociales autour d’un apéro ou le long de la promenade champêtre dominicale. L’atmosphère se charge d’un désir aussi inattendu que naturel.
Et c’est bien là où les frères Larrieu excellent ­ et excèdent certains grincheux. Grâce à une mise en scène élégante nourrit d’une sève renoirienne et à une intimité dans le filmage à la fois des personnages mais aussi et surtout des décors, ce qui aurait pu se résumer à une partie carrée de campagne dans le Vercors, s’impose comme un étrange et beau tableau du couple, interrogeant sur l’impossible désir de la conjugalité, imposant l’impérieux appétit de l’instant.

C’est l’innocence et la facilité avec lesquelles William et Madeleine vont passer à l’acte qui paradoxalement nous troublent. Troublée comme Madeleine dans ses petits gestes quotidiens. Troublé comme William quand il se laisse guider dans le noir profond d’une nuit sans lune par Adam l’aveugle clairvoyant.
Mais heureusement, Adam et Eva n’emmèneront pas William dans un improbable paradis, après avoir vu leur maison calcinée par les flammes ; et c’est tant mieux, même si le récit a dû perdre un peu de sa brillance pour cet épilogue. Il faut contempler Peindre ou faire l’amour comme un tableau luministe où les noirs sont profonds, mais l’écouter aussi pour les timbres fragiles et sensuels des voix, pour les crissements des feuilles piétinées, pour les silences suspendus avant les accords d’une chanson de Brel, de Ferré ou des Aphrodite’s Child.

Jean Gouny


1h38 - France - Scénario, dialogues : Arnaud et Jean-Marie Larrieu - Photo : Christophe Beaucarne - Décors : Brigitte Brassart - Son : Olivier Mauvezin, Béatrice Wick, Stéphane Thiébaut - Musique : Philippe Katerine - Montage : Annette Dutertre - Interprétation : Sabine Azema, Daniel Auteuil, Amira Casar, Sergi Lopez.

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