Hotel
Jessica Hausner
Sélection officielle
Un Certain Regard

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A l'hôtel Waldhaus, alpes autrichiennes, Irène succède à Eva en qualité de réceptionniste, Eva qui selon les apparences aurait mystérieusement disparu. Mais s'il est un film où il ne faut pas se fier aux apparences, c'est bien Hotel, qui ne cesse de jouer sur le réel et la vraisemblance, l'imaginaire et la légende. Tout ce dont on est à peu près sûr ici, c'est qu'Eva aura à son tour une remplaçante.
Contrairement à la publicité que fait l'établissement sur ce lieu magnifique qui est censé vous permettre de goûter au bonheur authentique, de découvrir de romantiques paysages, de retrouver l'atmosphère magique des contes de Grimm, le Waldhaus est particulièrement sinistre, dénué de vie, à l'instar d'Eva, impassible, dénuée de réactions… apparemment bien sûr.
Toujours filmée en très longs plans, toujours de face ou de dos, jamais de profil, Eva déambule au fil de long couloirs déserts, de sous-sols inhospitaliers, nage d'interminables brasses dans les eaux résonnantes d'une sombre piscine, s'enfonce dans une forêt dense et silencieuse comme l'indique la brochure et comme le chante aussi la chorale — « La forêt est noire et se tait. » — censée animer une fête, aussi incongrus que puissent paraître ces deux derniers mots dans le contexte qui nous occupe.

Chaque déplacement d'Eva trouve son issue dans un trou noir béant, avant qu'elle ne soit, évidemment, définitivement avalée par la forêt, nouvelle victime rêvée de la Dame des Bois. « Si vous ne comprenez pas tout, ne vous inquiétez pas, c'est normal. » Dans cet avertissement énoncé par Jessica Hausner lors de la présentation du film, on a envie de remplacer la notion de compréhension par celle d'ennui : « Si vous vous ennuyez… ». La réalisatrice parle également de « leurres dramatiques à ne pas prendre au sérieux », « d'un jeu dont aucune règle n'est donnée. » Qu'elle nous permette de penser que n'est pas Kaurismūki — dont très furtivement Hotel a pu évoquer l'univers — qui veut et que silence, dénuement et minimalisme ne riment pas forcément avec langueur soporifique.

Marie-Jo Astic


1h23 - Autriche - Scénario, dialogues : Jessica Hausner - Photo : Martin Gschlacht - Montage : Karina Ressler - Décors : Katharina Woppermann - Interprétation : Franziska Weizz, Birgit Minichmayer, Marlene Streeruwitz.

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