Le Pianiste
The Pianist
Roman Polanski
Sélection Officielle
Palme d'Or
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Trop académique, la Palme d'or 2002 ? Certainement pas puisque tout est ici question de profond respect pour l'incroyable destinée d'un homme et du récit qu'il en a fait. A l'instar du texte — publié en 1946, proscrit par le régime communiste et finalement redécouvert cinquante ans après — la très fidèle adaptation de Roman Polanski est distanciée, sobre, évidemment émouvante, forcément révoltante. N'en déplaise aux amateurs de pathos qui devront abandonner leur sensiblerie à l'entrée du ghetto. N'en déplaise également à ceux que le plus grand drame vécu par l'humanité commence à lasser. « Ne pas revenir sur le passé, c'est la meilleure façon que le passé revienne sur vous » disait Bernanos. Un propos dont la criante actualité, tout près de chez nous, chez nous, n'échappera à personne.
Il se nommait Wladyslaw Szpilman, on l'a surnommé « le Robinson Crusoé de Varsovie. » Il était un virtuose de Chopin jusqu'à ce jour, ce 5 décembre 1939, où les Juifs ont été sommés de « se munir de brassards blancs sur lesquels une étoile de David devait être cousue en fil bleu. »
On connaît l'inimaginable qu'a subi la quasi-totalité de ses concitoyens, il fallait raconter cet

autre inimaginable que Wladyslaw a vécu, seul, ahuri par la faim, jusqu'à en perdre la pratique de la parole, jusqu'à l'arrivée des troupes soviétiques, prêtes à la fusiller, puisqu'il portait un uniforme allemand : « J'avais froid » parvient-il à articuler. « Je vivais dans une solitude extrême, unique. J'étais seul dans un immeuble abandonné, dans un quartier déserté, mais au milieu d'une ville entière, qui deux mois plus tôt seulement vibrait d'une population d'un million et demi d'âmes, et comptait parmi les plus riches cités d'Europe. »
Entre temps, des "sélections" ont eu lieu. Comme autant de roulettes russes, elles ont immolé sa famille, avec laquelle, sur le lieu de triage, il partage son dernier repas : un caramel mou, acheté à un prix exorbitant à un gamin, et partagé en six. Dans un univers d'indicible barbarie, elles ont épargné le musicien jusqu'à la rémission finalement octroyée par un improbable sauveteur, un juste : la dernière volonté exprimée par Wladyslaw Szpilman, décédé en juillet 2000, est qu'un arbre nourri de l'eau du Jourdain soit planté à sa mémoire au Musée de Yad Vashem.

Marie-Jo Astic


2h28 - Etats-Unis - Scénario et dialogues : Ronard Harwood - Images : Pawel Edelman - Musique : Wojciech Kilar - Montage : Hervé de Luze - Décors : Allan Starki - Interprètes : Adrien Brody (Wlaslaw Szpilman), Thomas Kretschmann (Capitaine Wilm Hosenfeld), Frank Finlay (Le père), Maureen Lipman (La mère), Emilia Fox (Dorota), Ed Stoppard (Henryk), Julia Rayner (Regina), Jessica Kate Meyer (Halina).

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